Tanger et Rabat, ou “les joies de la relation et de l’administration”
Tanger, Tanger ! Cette ville m’a toujours attirée, peut-être bien à cause de l’émission « Tanger-Glasgow » que j’écoutais sur Couleur 3, et qui m’offrait tant de découvertes musicales plus improbables et envoutantes les unes que les autres, qui me donnait l’occasion de m’envoler et d’imaginer d’autres horizons …
Donc Tanger, puis Rabat, nos deux haltes marocaines, effectivement d’autres horizons !
Tout le monde nous a dit : « quand tu arrives au Maroc, tu apprends la patience, car les formalités d’entrée au port durent au mieux 30 minutes, mais en général près de 1h, 1h30 ». Nous sommes donc arrivés dans la nouvelle marina flambant neuve de Tanger, plein de pontons vides et donc de places disponibles, où le garde-port nous demande d’accoster au ponton-visiteurs pour les formalités d’usage. 2 heures 30 plus tard (!!!) nous pouvions enfin poser les amarres à notre place ! Autorités du port, douanes, police locale, nous avons complété un certain nombre de formulaires et signalé notre drône (que les douanes veulent nous confisquer, mais finalement il restera à bord). Pendant que je complète les formulaires où nous devons décliner nos pedigrees (identité du skipper, du propriétaire, de l’équipage, avec numéros de passeport, dates de naissance, domicile etc…) un autre skipper arrive et tend poliment sa liste photocopiée toute prête avec toutes les infos relatives aux quatre passagers. Je rigole intérieurement quand la gentille demoiselle lui demande de tout ré-écrire à la main sur le formulaire du port, qui sera ensuite recopié dans la base de données du bureau par la secrétaire qui seconde le capitaine en chef.
La place de la femme dans la société marocaine ne semble pas toute facile avec notre regard d’européens, et je ne sais trop quelle attitude adopter, moi qui suis plutôt portée à « défendre la condition féminine » en général. J’opte pour le profil bas, et laisse mon capitaine chéri assurer son rôle de chef de file. Je suis donc méga silencieuse, le regard sur les murs plus que sur les gens, et je réponds poliment par phrases courtes.
Date de naissance ? 9 avril // Profession ? HR Manager // HR ? C’est quoi ça ? Ressources Humaines // Ahhh, Ressources Humaines … ça doit être difficile ça !! Vous savez, il est 15h là, eh bien nous nous avons seulement eu le temps de prendre notre petit déjeuner à 7h ce matin, et depuis, pas de pause !!! … silence de mon côté, sourire intérieur, puis oui, effectivement, ça ne doit pas être facile tous les jours …
Le regard des hommes marocains à l’égard des femmes marocaines semble être très critique à l’égard de celles qui ne respectent pas les codes traditionnels … En discutant de ce sujet avec une marocaine qui m’aborde dans la rue, je l’interroge sur l’ouverture à l’Europe, si proche et si lointaine, les échanges commerciaux, cette plateforme de transit qu’est Tanger, entre Afrique du Nord et Europe à quelques kilomètres, les tensions que cela peut créer entre ces différentes cultures au sein des différentes générations, et elle m’explique que la proximité européenne justement renforce les sentiments nationalistes et la défense des valeurs traditionnelles …
Quelle que soit notre demande aux personnes locales, la première chose qu’on nous demande, c’est d’où on vient – de France – ah !! La France ! … Bravo pour la coupe du monde en tout cas !!! et puis tout de suite je vous souhaite la bienvenue au Maroc, quel plaisir pour nous de vous accueillir ici, c’est gentil de venir visiter notre pays et ils font tout ce qu’ils peuvent pour nous être agréable et nous rendre service.
On s’est baladé un peu dans la vieille médina de Tanger, en cherchant à sortir des parcours établis, des « grandes allées commerçantes » et des places qui fourmillent de monde, en s’enfilant dans des méandres sans fin et des dédales de ruelles, menant à des mini cours intérieures, ou s’ouvrant sur une autre ruelle, dans lesquelles nous avons découvert des mini-boutiques, des ateliers microscopiques, des super marchés hauts de 3m avec une surface au sol de 2 m2. Nous étions les seuls européens dans ces quartiers colorés, maisons blanches peintes de bleu jusqu’à mi-hauteur, décorées de plantes suspendues ou poussant entre deux dalles de ciment, de peintures et fresques lumineuses, ruelles dans lesquelles le soleil atteint à peine le sol tellement les murs sont proches les uns des autres, un vrai « autre monde », dépaysant, accueillant, souriant, même si je ne m’y serais pas baladée seule.
Depuis Tanger, nous avons rallié Rabat en +- 24 heures de navigation, jolis airs et peu de mer, surveillance des filets et des pêcheurs (bien signalés de nuit), observation des bateaux partis en même temps que nous pour voir quelles options ils choisissaient, lever de soleil et découverte de la ville tournée vers la mer derrière ses anciennes fortifications. Rabat est située à l’embouchure de l’Oued Bouregreg, et il est recommandé d’y entrer avec un bateau pilote à cause des hauts-fonds, des brises lames immergés, et de la densité d’embarcations en tout genre. Nous nous annonçons sur le canal 9 et attendons patiemment ledit bateau pilote. En remontant l’Oued Bouregreg, nous passons au pied de l’ancienne citadelle, la Kashbah des Oudaïas, puis longeons les rives bordées de barques de pêches, de constructions typiques et de nouveaux complexes, les murailles des anciens palais desquelles surgissent ça et là des palmiers et autres touches de verdure, et partout dans la ville retentissent les voix des muezzins pour l’appel à la prière. On ne voit pas toutes les mosquées, seulement la coupole ou le minaret de quelques-unes dépassent des toits de la ville.
A nouveau, après un long moment passé à accueillir les autorités portuaires à bord, l’inspecteur des douanes, le chien renifleur et son maître, le superviseur du port, bu avec eux un bon thé à la menthe en signe de bienvenue, s’être fait embarquer un téléphone par erreur (qu’ils nous rapporteront en soirée), re-l’inspecteur des douanes, et à remplir bien plus de formulaires qu’à Tanger, nous pouvons entrer dans la petite marina où le bateau restera quelques jours. De Rabat je n’ai pas pu profiter et très peu la visiter, mais nous avons parcouru avec Hervé les quelques lieux incontournables : la Kashbah et l’enceinte de l’ancien palais du sultan, le plaisir d’un thé à la menthe dans les jardins surplombant l’Oued, le tombeau de Mohammed V -ouvert à tous avec une porte aux quatre points cardinaux, gardées chacune par un homme en cape rouge, guêtres blanches et petit bibi rouge sur la tête, aussi imperturbable que les gardes londoniens- la Tour Hassan qui est un « reste » de la plus grande mosquée du Maroc jamais construite, et justement, jamais construite … les travaux abandonnés à la mort du sultan. Le minaret devait grimper à 80 mètres dans le ciel, au-dessus de Rabat Ville Impériale ; il ne fait que 44 m et surplombe la grande place où trônent les restes de toutes les colonnes qui devaient faire la structure de la mosquée. On s’est promené dans la médina, de jour et de nuit, atmosphères complètement différentes. La nuit, les touristes sont accompagnés par un marocain en djellaba qui porte une lanterne pour ouvrir le chemin.
Atmosphère beaucoup plus détendue qu’à Tanger, climat plus doux, moins soumis aux chaleurs et aux vents, la vie semble y être très agréable ; on s’y retrouve aisément, elle fait directement face à l’océan qui frappe sans relâche les falaises et déchiquète les rochers. J’ai là aussi envie de me laisser surprendre par ce qui se cache dans une cour intérieure, ou derrière une porte entrouverte, mais on ne peut pas passer la tête, on peut seulement imaginer et entre-apercevoir …
Nous quittons Rabat pour 3-4 jours de navigation en pleine mer pour rejoindre les Canaries, et le bug, c’est que Leslie l’ouragan se balade lentement en envoyant ses vents frapper la mer et les bateaux à près de 50 nœuds, donc il va falloir observer pour passer entre les gouttes et le gros temps ! On vous racontera ! Bisous bisous les fAmis 😊
Et bien sûr, plus de photos sur notre page Facebook https://www.facebook.com/myriadesaroundtheworld
Top ! Merci cousine pour ce joli récit et ces belles photos !!!