Lundi 6 janvier 2020, Mar del Plata à nouveau, encore, toujours ….
Le bateau est prêt à partir, l’équipage aussi, mais les vents ne sont pas avec nous. Alors je prends le temps de reprendre la plume pour partager avec vous quelques lignes et photos pour relater ces magnifiques semaines passées sur les routes argentines et chiliennes, le tout facilité par quelques sauts de puce (très grosses les puces) en avion.
On a découvert un peu Mar Del Plata, mais pas beaucoup. C’est LA station balnéaire des BuenosAiriens, dont les plages attirent beaucoup de monde en été. On a eu la chance de la vivre avant la haute-saison, période calme et plaisante, températures agréables et pas étouffantes. Le Club Nautico est assez actif et sportif à ses heures, tous les âges y naviguent avec un vrai plaisir, le sourire accroché aux oreilles. Les championnats du monde d’Optimist y ont lieu régulièrement, et d’ailleurs la prochaine manche aura lieu ici début février. On a assisté aux qualifications argentines, avec 250 petites coques blanches qui se sont mesurées les unes aux autres pendant une petite semaine. Absolument génial d’assister à cette émulation, cette énergie, cette envie que chacunchacune éprouvait au quotidien dès qu’il s’agissait de rejoindre le plan d’eau. Top de voir que la voile continue à attirer les plus petits, qui un jour deviendront grands, et qui à leur tour navigueront en Lazer, puis autres classes plus importants pour la joie de la navigation à plusieurs sur le même bateau.
12 décembre … moi qui m’étais promis d’écrire chaque jour pour garder une trace de nos balades terrestres, voilà que je manque déjà à ma parole … c’est comme le dessin, ça devient vain ……
On est à El Chalten, dans les parcs de glaciers et la région des lacs argentins le long des Andes. Pas en altitude incroyablement élevée, non non, mais bien dans de magnifiques régions désertiques desquelles émergent des massifs montagneux époustouflants. Des montagnes toutes jeunes, bien dentelée et découpées, affûtées, filant vers le ciel et dansant dans l’air des temps, sans avoir encore été polies, lavées, brossées, soufflées et réduites par les éléments plus forts qu’elles : le vent, l’eau et le temps …
C’est beau, c’est magnifique, et je commence à vraiment apprécier la dimension « montagne », c’est cool. Moi qui ai toujours été « pro-mer », je vais pouvoir varier mes activités et mes plaisirs en pleine nature. C’est bon de marcher comme ça, les pieds sur terre, le nez en l’air, les yeux attrapant tout ce qui passe au vol, le nez dans les odeurs de fleurs, de terre, d’herbes chauffées au soleil, les oreilles grandes ouvertes à tous ces bruits, ces chants, ces souffles …
On a quitté Mar Del Plata lundi soir 10 décembre, à minuit 30 en bus, pour filer attraper notre avion à Buenos Aires. 5h1/2 sur la route de nuit, se laissant bercer par le ronron du moteur et les joyeux climatiseurs juste au dessus de nos tête. A peine arrivés, on a sauté dans un taxi pour filer à l’aéroport.
3 heures d’avion plus tard, on atterrit à El Calafate, au milieu de rien. Une grande lagune turquoise se détache, grosse tache, et contraste fortement avec le désert environnant. Immenses étendues plates, à peine vallonnées, à perte de vue. Sec. Pas un buisson, pas un arbre, quelques touffes d’herbe rase, et de la terre poussière pierre à gauche à droite devant derrière partout, c’est tout. Ciel bleu en arrivant, petit vent frais, pas trop puissant, le climat nous semble bien agréable. On récupère notre voiture tout terrain et en route pour « la ville ».
Un vaste plateau en pente très douce au bord d’un lac bleu-opale-turquoise nous y amène. Petites maisons sur un seul niveau, colorées, faites de briques et de bois, plutôt bien entretenues, petite ville, organisée autour d’une grande rue qui regroupe tous les commerces, entre magasins d’équipement sportif (on est à la « Mecque de la randonnée » dans le coin), bistrots mettant des agneaux rôtis en croix dans leur vitrine, artisanat local (peaux de moutons déclinées à l’envi) et bijouteries nombreuses (pas mal de pierres semi-précieuses dans la région). En dehors de la grand-rue, pas grand-chose. Des maisons de-ci de-là, le long des routes ou des pistes, un peu dans tous les styles.
A El Calafate même, pas grand-chose à faire. Rien à faire. Point d’intérêt majeur pour nous, pour beaucoup : le glacier vivant du Perito Moreno. Incroyable. Majestueux. 280 km2 de glace vivante, se renouvelant au fil des ans. Des pans entiers tombent dans le lac régulièrement, poussés par cette masse incommensurable, qui pousse qui pousse qui pousse en avant depuis les sommets environnants. Des arches se créent, puis se rompent subitement et tombent dans l’eau (phénomène sur plusieurs années, pas dans la journée…). Les moraines zèbrent ces structures, le vent cisèle des failles, la pluie creuse des puits, le soleil joue avec ce relief incroyable et offre des perspectives fascinantes. Au-delà du magnétisme visuel que dégage cette beauté de glace, ce sont ses bruits qui nous interpellent aussi ! par ici ça claque comme un coup de fouet, par là ça gronde comme le tonnerre qui roule, parfois c’est un bruit de bois sec, ou encore d’autres sons qui s’apparentent à une chute de pierre … le glacier parle, vit, rugit, chuchote du haut de ses 70 mètres d’épaisseur (au-dessus de l’eau, et pas loin de 160 mètres de glace sous le niveau du lac).
On a la chance de venir admirer ce géant en fin de journée, il n’y a presque personne, c’est un privilège de pouvoir le voir en plus par un temps dégagé, puisque le ciel se reflète un peu dans son miroir, et le part de délicates teintes turquoise selon son relief. Le dessus du glacier ressemble à s’y méprendre à un meringage italien plein de petits pics se hérissant vers le haut, on dirait un énorme gâteau glacé. Difficile d’en mesurer l’étendue et les dimensions, sauf quand on voit un kayak s’approcher de cette gigantesque muraille. Notre premier contact avec les glaces argentines ne nous laisse pas … de glace !
Après cette découverte majeure, nous filons sur El Chalten, « encore plus la Mecque de la rando » que El Calafate. Pour remettre le cœur d’Hervé en route, rien de mieux que quelques kilomètres à pieds dans cette nature splendide. De El Chalten, on a entendu « joli petit village de montagne. Donc on imagine … et on puise dans notre référentiel alpin et jurassien, mais ce n’est pas tout à fait ce paysage-là qu’on trouve au bout de la route. D’ailleurs la route pour y aller, on n’en voit rien ! il pleut, les nuages sont bas sur l’horizon, on serpente parfois le temps de changer d’altitude (au moins 50 mètres de dénivelé sur ce sol composé de strates), sinon c’est tout droit. Au fond des strates, il y a souvent un petit rio, peu empli à cette période de l’année, peu de débit, et très souvent verturquoisopaque. Quand enfin il ne pleut plus, on découvre des paysages splendides, grands, immenses, surtout immenses en fait, les couleurs de pierre et de terre dans tous les niveaux de brun, beige, ocre, gris, parfois un peu de rouge ou de noir. La végétation -quand il y en a- est basse, toute petite, rase, plus de l’ordre du bonzaï que de l’arbre. Petites fleurs, petites feuilles, petites branches, petits buissons, petits mais super résistants, souvent des plantes grasses et épaisses, souvent épineuses aussi, bien souvent mortes aussi …
El Chalten, on s’y balade pendant 2 jours parce que le climat est propice aux randos, et le paysage nous attire. On s’embarque sur un sentier qui nous mène en boucle entre les pâturages (rien n’y broute soit dit en passant) et la forêt, nous offrant après quelques kilomètres une vue splendide sur le massif du Fitz Roy. Wouahou !! Nous n’imaginions pas ce que ça pouvait être lorsque les sommets ont émergé des nuages. Des falaises de pierre douce de couleur chaude, escarpées et vertigineuses, avec quelques plaques de neige, des nuages accrochés aux sommets élancés … à regarder les noms de ces sommets de plus près, on découvre des noms connus : … Mermoz, Saint-Exupéry, et Guillaumet (qui s’était fait prendre par une tempête dans son Potez 25 alors qu’il survolait la Cordillère) et puis Fitzroy lui-aussi bien sûr, en hommage à tous ces explorateurs et aventuriers volants qui assuraient la communication entre les hommes par l’Aéropostale par-dessus les Andes …
En se baladant dans ces massifs montagneux, on a côtoyé pas mal de monde finalement, car on est loin des sentiers dépeuplés ! On a été frappé par le nombre de nationalités des gens qui se baladent par ici ! Beaucoup de français, mais on y croise toutes les langues, toutes les origines, toutes les religions (plus ou moins affichées), le monde entier arpente les flancs de montagne, les prés et les pierriers, se retrouve au bord des lagunes et au pied des glaciers. Beaucoup de monde en général, mais on ne s’est jamais senti noyé dans la foule. Juste impressionnés par tout ce monde qui vient de si loin pour marcher dans ces paysages magnifiques.
Après El Chalten, on s’embarque pour 6 heures de voyage pour traverser le désert du sud argentin : longues routes tout droit, aucune végétation, que la terre aride et sèche, le désert à perte de vue, l’immensité dans laquelle on pourrait se noyer, aucun arbre auquel se raccrocher. Un îlot au milieu de cette gigantesque plaine : un espèce de « Bagdad Café » où on trouve de tout, un semblant de vie, une borne wifi (la seule dans ce désert, dont les mérites sont vantés loin à la ronde), une station essence, de l’eau, des empanadas, juste de quoi faire une pause avant de replonger dans le rien. On s’arrête pour la nuit à Rio Gallegos, avant de se préparer à rejoindre les gars enfin, à Punta Arenas le lendemain, 14 décembre.
Parce que avant d’avoir envie de découvrir le sud de l’Argentine par la route (on avait bien sûr envie de le découvrir par la mer), c’est surtout nos retrouvailles tous les quatre qui nous attirent là-bas, tout au bout du bout du monde … la route que l’on emprunte porte bien son nom d’ailleurs : Ruta del Fin del Mundo !
Puisqu’on n’a pas pu modifier les billets d’avion de Hugo et Nathan suite à l’infarctus de Hervé, eh bien nous avons modifié le voyage initialement prévu. On devait se retrouver aux Malouines tous les quatre avec Myriades, et filer ensemble en bateau vers Ushuaia. Finalement, les gars ont volé depuis Londres avec la RAF jusqu’à Port Stanley, y ont passé 5 jours totalement déconnectés, à la découverte de ces paysages totalement inconnus, à la rencontre des pingouins et des manchots, du vent et de la pluie, du Grand Sud … Ils y ont fait du kayak de mer un jour sans vent, ils sont allés dire bonjour aux manchots dans leur réserve un jour sans touristes, ils ont réparé les vélos d’Arlette pour aller visiter un bout de ces îles, ils ont discuté un peu avec les gens rencontrés dans leur auberge, ils sont allés chercher la clé du phare au musée du coin, la clé faisait la taille de leur avant-bras, ils ont eu du soleil 4 jours sur 5, ils ont savouré et se sont régalés !!! « Que du bonheur » nous disent-ils quand on les voit enfin débarquer à l’aéroport de Punta Arenas … deux immenses sourires illuminent leur visage gorgé de soleil, quel bonheur surtout de les retrouver ! Quelle chance ! Après ces quelques 5 mois à distance, et même si la communication est facilitée entre nous par internet, ce n’est pas comparable à un vrai sourire, un vrai câlin (même fugace), à des yeux plantés dans les yeux de l’autre, à de grands bras enserrant les épaules … j’adore ces moments d’échanges vivants !
On les récupère et on les emmène jusqu’à notre petit logement, et on passe la soirée à se donner des nouvelles, se raconter nos péripéties, échanger sur des petites et grandes choses. Ils déballent leur valise et en sortent un gros tas de victuailles suisses … messages arrivant en direct de nos familles : chocolat, marrons glacés, cénovis, cadeaux de Noel, rouleaux de scotch d’électricien, pièces pour le bateau, et là les gars réalisent qu’ils ont oublié dans le frigo de leur auberge malouine le gruyère et la fondue …. Arghhh … mais bon, l’essentiel est devant nous : notre famille réunie.
Le weekend au sud du Chili (puisque nous avons passé la frontière, oui) tout est fermé dans les villes, alors on part en balade au bord du Détroit de Magellan, direction le phare « San Isidro, ultimo gran faro del continente americano ». On a un peu l’impression de se balader au bord d’un lac en Suisse comme dirait Nathan, et pas du tout « au bout du monde » … mince alors !!
16 décembre, on arrive à Puerto Natales, toute petite ville par rapport à Punta Arenas. Elle a le « charme calme » d’un village où les randonneurs sont fréquents ici aussi, puisque c’est de là que partent les excursions pour le magnifique parc de Torres Del Paine. Bord de mer ressemblant à un lac, sommets au loin ronds et peu élevés, un peu enneigés, la mer est calme toute calme, et comme la côte est toute proche, on n’a vraiment pas le sentiment d’être sur le Pacifique. C’est pourtant bien là qu’on est ! Sur la côte Pacifique … « Lac » de montagne, collines douces, terre foncée, assez sablonneuse, abords du lac tout doux, la verdure se fond dans les cailloux-graviers-rochers, des massifs de lupins violet-rose un peu partout.
17 décembre, météo moyenne, on part se balader du côté de la grotte du Milodon, terrain qui abrite les premières traces des hommes par ici, et les dernières traces de milodons, espèce grassouillette de gros paresseux dinosauresque de deux-trois fois ma taille, disparu il y a longtemps mais découvert par ici récemment.
On se balade au milieu de rien, mais dans une nature beaucoup moins désertique que le sud argentin. Ici plus vallonné, plus vert, plus varié, plus humide puisque plus pluvieux … ! 6-7 km de balade, Hugo super curieux lit tous les panneaux, s’intéresse, regarde commente analyse et partage, Nathan plus rêveur, plus silencieux, photographie en étant super attentif à nous tous. C’est cool de se balader avec eux, de partager du temps, de partager le même silence, d’échanger, de se sentir vivre ensemble. Des partages à tout niveau, on parle de tout de rien, on reprend les conversations là où on les avait laissées, on « fait le point » sur différents sujets, tout semble rouler et bien se passer dans leur vie.
En montant sur Puerto Natales, on a traversé des paysages très particuliers : des kilomètres et des kilomètres le long de forêts totalement desséchées de bois blanchis, ébranchés, dénudés, ne restaient que des troncs sans rien qui tenaient miraculeusement debout tentant encore de pointer vers le ciel … que s’est-il passé par ici ? une végétation totalement mangée et détruite par les insectes ? une sécheresse très locale ? des incendies ? un parasite a en tout cas eu raison de tous ces petits arbres, et il n’en reste rien ! étrange, triste, particulier, interpellant !
Mais donc le sud du Chili n’a rien à voir avec le sud argentin. L’un est sec, l’autre est humide. L’un désertique, l’autre plus varié. L’un est plat, l’autre vallonné. L’un est desservi par une route monotone toute droite et sans abri, l’autre se voit traversé de part en part par une route plus serpentueuse, avec des arrêts de bus tous les 5 km avec leur petite cahute bleue ou rouge, avec un arrêt « évitement » tous les 2 km pour se mettre à l’abri d’un gros camion, aussi désertiques l’un que l’autre mais deux suds très différents.
Puerto Natales : petit village où le temps ne semble pas avoir trop prise. Les vitrines des magasins ne montrent pas se qu’on y trouve à l’intérieur, la pharmacie vend autant de médicaments que de produits ménagers ou de jeux pour les enfants, quelques meubles et autres vélos … étrange et rigolo. Chaque commerce « officiel » fait double ou triple ou quadruple commerce, ils se diversifient pour augmenter leur chance de revenus sûrement … Les touristes sont clairement la source principale de l’économie locale. Les maisons sont basses, colorées, faites de tôle ou de brique. Pas beaucoup de bois de construction par ici, ni de pierre. Il faut dire qu’il n’y en n’a pas trop dans le paysage ! Pas de pêcheurs non plus, ni d’agriculteurs …
Mercredi 18, on quitte Puerto Natales pour rejoindre le massif de Torres del Paine. Belle balade en après-midi -le soleil se couche vers 22h30 par ici et se lève à 4h45, ça laisse du temps pour faire plein de choses en extérieur !!- pour découvrir les contreforts de ce gigantesque massif. Incroyables paysages, composés de montagnes dentelées, de collines plus arrondies, de lagunes, de lacs, d’eau « turquoise opaline laiteuse pas transparente du tout mais tellement lumineuse et intense », cette terre sablonneuse entre le noir et le beige, contraste intense entre lacs et terre, ce bleu et ce brun « chocolat chamois ». Et puis un vent incroyablement fort nous accompagne tout au long du chemin, jouant avec les nuages et nos oreilles, il dégringole des montagnes à vitesse vertigineuse, on l’éprouve en grimpant sur une petite butte, il nous fait trébucher, les gars se couchent « dessus » : inclinés à 60° et posés sur l’air, les pieds à terre, sourires accrochés aux oreilles.
Lendemain matin, départ matinal à 7h30 pour aller faire l’ascension qui nous mène aux pieds des fameuses tours « Torres del Paine ». 24 km prévus, départ de la marche à 9h, retour 17h15, 30 minutes de pause en haut lors de notre arrivée à la lagune magique ! Balade un peu fatigante oui, c’est pas tous les jours qu’on fait 25 kil en montagne, mais c’était super !! Les paysages évoluent pas mal selon l’altitude, on commence dans les collines douces avec végétation rase, puis on chemine en forêt quand il se met à pleuvoir, puis le temps s’assèche pour parcourir les derniers kilomètres sur le pierrier et grimper comme des cabris (on aimerait bien Nathan et moi avoir leur aisance mais on a un plutôt un peu de Paine, pendant que Hugo bondit de pierre en pierre sans effort apparent), les nuages jouent avec le vent ce qui rend les paysages contrastés et magnifiques.
Lagune vertuqueau (eau vert turquoise) entourée de ces tonnes de pierre, montagnes verticales, pics rocheux, amoncellement incroyable, massif vertigineux, dentelé parfois, plus carré sous d’autres angles, enneigés quand la pente le permet, eau nichée au creux de la roche. Les gens sont assez respectueux, silencieux, admiratifs. La descente se fait à peine plus vite que la montée, c’est dire qu’on a bien marché dans un sens comme dans l’autre.
Pendant ce temps, Hervé est allé à la lagune Azul pour avoir un autre point de vue sur les Torres, et a aussi beaucoup admiré la faune locale. Les guanacos si fiers d’allure d’habitude, avec cet air parfois supérieur de celui qui a un plus long cou que toi, se sont montrés à lui sous un autre angle, un autre jour en plein jour : le mâle guanaco a l’air beaucoup moins fier quand il a les oreilles rabattues vers l’arrière …
Après cette belle et longue marche, on s’engage dans ces paysages pleins de surprises par la route, par la piste plutôt, direction El Calafate (à nouveau ! c’est tellement beau qu’on y retourne). Rien à gauche, rien à droite, pas de voiture devant, ni derrière, quelques collines, beaucoup de pierre et de sable, un peu de vent aussi, tout ça à la nuit qui tombe gentiment … On passe la frontière chilo-argentine dans cette immensité toute vide. De chaque côté de la barrière, un carré dessiné à la peinture au sol. Dans chaque carré, un douanier, en train de jouer au foot, qui n’arrêtent pas leur partie nous voyant arriver, et nous indiquent simplement le cabanon où il faut entrer pour les formalités. On passe du guichet 1 pour les premiers tampons d’immigration, au guichet 2 pour la douane, au guichet 3 pour valider la rentrée de la voiture en Argentine. Au moment de repartir, la partie de foot s’arrête, le temps de lever la barrière et que le douanier nous court après pour récupérer le papier que nous avait donné son collègue au guichet 2 …
Dire que le temps file est une éternelle répétition, un constat au quotidien, les journées sont trop courtes et bien remplies.
Retour à El Calafate pour aller re-découvrir le Petito Moreno avec les garçons …. Les gars sont bluffés devant ce pesctacle. Retour en enfance pour tout le monde, on s’émerveille comme des petits devant la magie et la beauté du lieu.
Et puis une dernière étape de notre première partie de séjour, une courte halte dans une estancia au milieu de rien, on savoure une mini-balade à cheval, une pause « sandwich au barbecue » à la mode « gaucho », un temps de pause isolés au bord d’une lagune dans un endroit désertique, bonheur sous les étoiles.
On remonte quelques jours à Mar Del Plata pour Noel, temps de fête qu’on partage avec les bateaux copains et surtout avec nos Anges Gardiens, José et Françoise, qui une fois de plus, ouvrent en grand les portes de leur maison pour y accueillir tout le monde. Pas un bateau ne passe à Mar Del Plata sans être invité chez eux. Pas un français ne se balade à Mar Del Plata sans que Françoise ne le repère et l’invite à boire un café, qu’elle « trouve » ce touriste au supermarché, dans la rue ou au port, c’est sa manière à elle de vivre : dans le partage, l’entraide, la communauté, le faire ensemble et le vivre ensemble. José lui ressemble beaucoup dans son immense bienveillance, sa générosité sans limite et son grand sourire accueillant. Des Anges. Vraiment.
Et José, Don Pépé, s’est évertué à toujours me parler en espagnol, ce qui m’a permis de progresser un petit peu … Dans les plaisirs de la traduction, on rigolait bien fort de temps en temps puisque nos « traducteurs en ligne » nous offrait des variations intéressantes … Par exemple, José me disait « je regrette de ne pas pu avoir partagé un assado à la maison avec tes fils », et « Google mon ami » me traduisait ses propos de manière un peu déformées, puisque José m’affirmait qu’il « regrettait de ne pas pouvoir rôtir mes fils » .. !!! Enfin, je suis loin de maîtriser un niveau A1 ½ en espagnol, mais je comprends plutôt bien les réponses aux questions que je pose, c’est mieux que rien !
28 décembre déjà … Le temps des vacances se raccourcit, on a déjà consommé des grosses tranches de bonheur, reste à découvrir Ushuaia d’où les garçons repartiront vers l’Europe. On y atterrit en milieu de journée avec un bon vent bien remuant, qui nous balade dans les airs comme un chariot sur un grand 8 dans une fête foraine, on découvre que les sommets environnants sont assez élevés, une terre à nouveau aride au-dessus des forêts, un entremêlé d’eau et de terre, de criques et de lagunes, de pierres et de verdure, et surtout des vents d’une puissance à nous souffler dans les poumons.
On découvre une ville trop touristique, pleine du monde que déversent les bateaux croisière hauts de plusieurs étages, les mêmes qui abîment Venise, ville très commerciale et sans intérêt. Ville argentine qui se déclare « Capitale de Las Malvinas » et qui érige son musée malouin, témoigne sa reconnaissance à tous les jeunes tombés durant la guerre, et néanmoins s’arroge encore le droit de déclarer que les Malouines sont argentines malgré le contexte géopolitique actuel. Nous ne tombons pas en amour devant Ushuaia. Mais ses alentours regorgent de splendides balades à faire à terre, comme le glacier Marcial d’où la vue sur le Beaggle et Ushuaia est très belle, la lagune Esmeralda qui a des airs totalement exotiques, … ce qui nous réjouit à l’idée de revenir par ici en bateau, pour continuer les découvertes des environs par la mer. On profite de nos quelques jours surtout pour crapahuter dans la nature encore et encore, et pour partager des moments joyeux tous les quatre, avec le compte à rebours qui égraine les jours qui passent comme des secondes, instants fugaces à l’échelle de toute une vie, et instants précieux dans nos courtes vacances tous les quatre réunis.
3 janvier : Le retour à Mar Del Plata est cette fois le dernier retour à Mar Del Plata, ça c’est sûr ! On y accueille notre nouvel équipier le 4 janvier, James qui nous accompagnera pour la descente sur Ushuaia, on fait la liste des dernières choses à faire, et puis … on attend. On fait un briefing météo deux fois par jour pour voir les tendances ; le jeu des dépressions qui passent les unes après les autres, de manière beaucoup trop rapprochée, ne nous offre pas de fenêtre potable pour prendre la mer … le vent tourne dans tous les sens en moins de 24h, passe de 5 à 50 nœuds en moins de quelques heures, nous promet de la navigation peu rigolote, donc on attend … Un point positif : ca nous permet enfin de vous raconter nos balades splendides dans ces terrains hostiles et tellement beaux, de partager le plaisir que nous y avons eu, et de revivre ce temps béni de 3 semaines, pour accrocher bien haut dans nos mémoires ces souvenirs d’avenir qui nous remettront des étoiles plein les yeux, et du baume à l’âme. Merci mes trois hommes pour tout ça.
Depuis ces dernières lignes qui datent du 6 janvier, on a fini les courses de « frais », on a cuisiné quelques plats en avance, on a fini de remplir les cales de différentes victuailles (oui oui, j’ai encore cette satanée peur de manquer qui me colle à la peau, et puis .. bah, on est gourmands et on ne va pas se refaire !), on a mangé une dernière bonne viande grillée (les mecs ont mangé), profité d’un massage bienfaiteur (j’aurais dû y goûter plus tôt !!! j’y serai retournée plein de fois !!!!) et nous voilà partis au petit matin samedi 10 janvier à 6h, avec un délicieux pain fait par José et Françoise pour notre départ. Depuis ces dernières lignes du 6 janvier, on a pris la mer direction la Caleta Di Horno (longue et magnifique caleta totalement fermée, un peu au sud de la péninsule Valdes, coordonnées GPS : 45°01.776’ S 65°40.798’W) pour 4-5 jours de mer, sachant pertinemment que si la météo l’imposait, nous pourrions aller nous mettre à l’abri à San Blas, un tout petit peu au sud de Bahia Blanca. On est parti avec le vent un peu portant, puis on s’est vite retrouvé au près … avec pour résultat un équipage qui a fonctionné à 2 personnes pendant 24h, le troisième larron oscillant entre son lit et les wc… ma pomme, pour changer … La météo prise au matin du 2ème jour nous a imposé le choix de la raison : détour par San Blas, pour aller se mettre à l’abri des gros coups de vents du nord puis surtout du sud, avant de pouvoir poursuivre notre route. C’est depuis ce lieu reculé et isolé qu’on vous écrit aujourd’hui … San Blas c’est une rue qui longe la mer, avec une alignée de petites baraques du côté « trottoir », et la mer de l’autre côté de la rue, bordée de petits bancs et de parasols de bois, avec les argentins locaux qui pêchent qui pêchent qui pêchent avec leurs loooongues cannes à pêche. Il n’y a pas grand-chose de plus.
Il y fait beau et chaud, très chaud quand le vent est au nord, sérieusement moins chaud quand le vent est au sud, le soleil est haut perché dans le ciel, eau turquoise laiteuse autour de nous, et rien à l’horizon ! La baie est délimitée par une terre très plate, sans arbres, quelques maisons basses se devinent sur les langues de terre. L’estran se couvre et se découvre au fil des heures, laissant apparaître un soupçon de verdure dans cet infini de bleus, le ciel se fondant dans la mer … quelques bancs de sable esquissent subtilement la limite entre ces deux immensités.
Les prévisions nous permettent d’envisager de partir vendredi 17 janvier tôt, dès que la renverse aura lieu (lorsque la marée sera descendante) puisqu’ici il n’est pas rare d’avoir 4 nœuds de courant d’eau (soit +7 km/h), et quand on sait qu’on avance au moteur à 5 nœuds … (pour les courants d’air, on est pas loin des 65 km/h en ce moment)… on vous laisse faire les calculs qui nous aident à prendre des décisions …
Voilà pour les dernières news du 15 janvier, on vous embrasse du fond du cœur et on se réjouit de vous raconter la suite !!! Bon ski à tous, bon boulot à vous et plein de joie dans vos activités !!! Gros gros becs de nous deux, on vous aime !!!
Hola les aventuriers,
Magnifique récit toujours empreint de passion, d’émerveillement et d’amour.
J’en profite pour vous souhaiter un merveilleux vent de liberté en cette nouvelle année et une santé de fer au capitaine !