Vendredi 7 octobre 2022 – Il pleut aux Marquises, et ça roule aux Marquises …

Nous qui nous réjouissions de découvrir Hiva Oa, de partir sur les sentiers de rando, d’aller découvrir les tikis perdus dans la nature, de rendre hommage à Brel et à Gauguin, eh bien nous voilà déjà repartis … Nous y reviendrons lorsque la météo sera plus clémente … depuis que nous sommes arrivés, le ciel se déverse sur nous, et la houle du sud entre dans la baie des Traitres. Les courants marins rivalisent d’ingéniosité pour rebondir de falaises en falaises, de rochers en rochers, pour venir s’écraser dans la baie de Tahauku où nous sommes ancrés. Le mouillage nous fait faire des 360 incessants, le ballet des bateaux autour de nous est totalement asynchrone, ni le vent ni les vagues ne savent nous faire rentrer dans les rangs.

A Hiva Oa, la terre et la mer sont formées de triangles. Tout y est pointu, une succession de pointes hirsutes, une organisation géologique fractale, de gros toblérones aux moyens toblérones avant d’arriver aux minuscules toblérones pointus … la mer c’est pareil, des grosses vagues hérissées par des moyennes vagues chevauchées par des petites vagues, le tout s’écrasant constamment depuis notre arrivée contre la coque, sous la jupe de Myriades. C’est … usant, fatiguant, irritant, et tellement inconfortable, bien plus inconfortable qu’en navigation !

Alors nous quittons Hiva Oa ce matin pour trouver refuge à quelques 10 miles au sud, sur la côte ouest de Tahuata.

Nous y arrivons sous un grain généreux, je pose l’ancre en maillot de bain-ciré et prends une douche d’eau douce (mais plutôt fraîche) pendant la manœuvre, et nous retrouvons avec délice un environnement sonore plus ténu aux oreilles (on passe du tintamarre général au doux babil de la pluie, ponctué des incessants délicats « ploc ploc ploc » des gouttes, aux « vrouffff » des seaux du ciel). Une douce longue houle vient quand-même bercer le mouillage, mais là c’est un mouvement que nous aimons bien, les nuits seront enfin reposantes.

Lundi 10 octobre 2022 – Vaiathu – on le prononce VA-I-TA-OU

Ca y est, on a à peu près récupéré !! bon, on l’avoue, on a quand-même besoin d’une mini-sieste après le dèj, faut dire qu’on se lève tôt ici, puisque le soleil nous tire du lit vers 5h30 (il fait grand jour à 5h, Hervé est souvent debout vers 4h30 et moi je bouquine à partir de 6h .. ) et que nos soirées sont toujours au tempo européen .. donc forcément, il faut remettre un petit morceau de repos au mitan de la journée …

La pluie a fini sa mélodie et rangé ses bassines et ses seaux, le vent chasse les nuages et l’eau retrouve une teinte qui donne envie de s’y tremper … Quel régal de pouvoir à nouveau nager un peu et se baigner !!! c’est intéressant de découvrir le relief marquisien sous-marin : le snorkeling se fait en bord de crique, il y a peu de choses à voir. Si on tente le long des falaises qui surplombent les petits caps, on se flotte-nage-ballotte au-dessus de falaises verticales, avec éventuellement 5 mètres de pente douce juste sous la surface de l’eau, mais très très vite on ne voit plus le fond, on est comme en pleine mer. Avec plein de bancs de poissons, petits et plus grands, mais on n’a rien vu d’effrayant – hormis ces gouffres qui donnent presque le vertige.

On a posé l’ancre en début de journée à Vaiathu, le grand village de Tahuata. 250 habitants dans le village, 60 à Hapatoni (la prochaine baie, au sud), 100 au village du nord, et 100 au village de l’est. 50 enfants entre 3 et 11 ans qui nous accueillent avec toute leur curiosité, 60 joueurs de pétanque membres du club de l’île, un restau ouvert à midi, 2 roulottes qui proposent des casse-croûtes au bord de l’eau, une épicerie qui cuit des baguettes le lundi, le mercredi et le samedi, une épicière qui rigole quand tu lui demandes si elle a du jus de pamplemousse (dans le frigo : jus d’ananas, mangue, cocktail de fruits, banane, mais pas de pamplemousse) et du coup elle te dit que tu peux te servir sur l’arbre juste derrière toi – et tu peux prendre des citrons aussi !

 

Quoi d’autre .. ? ah oui ! une église incroyable !! Construite en 1986 par les marquisiens bénévoles, financée par le Vatican, inaugurée en 1988 lors d’une immense célébration, faite de pierre et de bois, grandes ouvertures permettant à l’édifice et à la foi de respirer au rythme de la nature et d’être en lien avec les éléments, elle inspire et en impose. La Vierge Marie tient son fils non pas dans ses bras, mais le présente les deux bras en avant. Et le Petit Jésus tient dans ses mains un uru, fruit de l’arbre à pain, symbole des Marquises. Magnifique syncrétisme qui allie la culture locale et les archétypes catholiques, réalisé par un artiste de Nuku Hiva, dans un tronc de tou, arbre de fer issu de Vaiathu.

 

 

Et puis des gens adorables, des enfants hyper souriants, curieux, qui t’apprennent des mots marquisiens et rient à gorge déployée de ton incapacité à prononcer leur nom correctement – il faut dire que ce n’est pas tout simple ! par exemple la simple petite question anodine « ça va ? » se dit « mea meitai oe ? » toutes les lettres se prononcent, le U se dit OU, le E se dit é, le I se prononce comme s’il était coiffé d’un tréma … – demain on ira jouer à la pétanque avec eux à 16h, face à la mer, c’est un chouette moyen pour faire un peu mieux connaissance, nan ?

Lundi 24 octobre … – A nouveau ou encore à Tahuta

Alors là … on s’est laissé happer par ce pays et son tempo sans rien y voir … !

On est aux Marquises, c’est un archipel assez magique, qui demande à être approché doucement, qui se révèle tranquillement, et qui t’attrape le cœur facilement.

Ca fait un mois déjà qu’on a abordé les terres escarpées de ces îles généreuses, j’ai l’impression que c’était hier … On est tellement bien ici ! Je disais à Hervé ce matin « c’est bien dommage que les Marquises soient si loin de l’Europe, car je pourrais bien imaginer rester là longtemps ». Le climat est super agréable, tempéré et venté, on s’y sent aussi bien qu’en Corse, l’eau est parfois claire (c’est le seul point d’ombre au tableau), les gens sont plus que charmants et accueillants, partageurs, curieux, actifs. Tout semble y être possible, il y a mille choses à faire, et en fait, il y a une chose à faire : prendre le temps de vivre l’instant. C’est LE pays pour apprendre à pratiquer ce « Vivre l’Instant Présent ».
Quand on descend à terre, on est à peu près sûrs de rencontrer quelqu’un, et c’est presque toujours un moment qui dure ; on parle, on échange, on questionne, on rigole, on observe, on discute, de tout, de rien, d’eux, de nous, de la météo, de l’héritage, on mélange les sujets, et tout se fait avec sourire, douceur, accueil, respect, c’est bon, c’est doux, c’est généreux.

Beaucoup de personnes ici travaillent avec leurs mains, que ce soit la sculpture sur os, ou sur bois, la création du tapa, la gravure sur graines et noix de coco, les artisans développent un savoir-faire et se le transmettent souvent de père en fils, et ça donne envie ! Envie de s’approprier la gouge et la meuleuse, le bois de rose et l’os de bœuf, envie de s’échapper dans la transformation et la création, de se laisser happer par ce que nos mains sont capables de faire advenir, envie de s’immerger et de se laisser transporter. Je vous raconterai un peu ces différents personnages dont je vous montre déjà ici quelques visages.

Aux Marquises depuis un mois, et ça fait bien 15 jours qu’on se balade entre Hiva Oa et Tahuata, en fonction de la météo, de l’état du frigo, des envies et des activités. On n’a pas beaucoup marché ces derniers temps (ça monte beaucoup, haha, et puis il n’y a pas quarante mille chemins praticables) mais on a fait quelques heures de cheval, on a transformé un morceau de bois en un joli tiki avec nos petites mains, on a rencontré différents artisans, on a rendu visite à Paul et à Jacques, Gauguin et Brel, à Jojo aussi, l’avion de Brel, on a passé un super weekend avec des amis sur l’eau à pêcher notre repas, de jour et de nuit pour les plus courageux, on a discuté avec les locaux, on a fait un peu de snorkeling, bref, on s’occupe un peu et surtout ça passe vite, trop trop vite !

Le bateau sortira de l’eau le 10 novembre pour son estivage, et d’ici là on va aller dans les criques du nord de Hiva Oa pour aller à la découverte de nouveaux sites historiques et de nouvelles criques. Le terrain de jeu n’est pas immense, mais chaque baie donne envie de s’arrêter, alors on n’est pas près d’avoir terminé !

Mercredi 26 octobre 2022 – A l’ancre dans la baie de Hanamenu, sur la côte nord-ouest de Hiva Oa.

Partis ce matin de Tahuata sous voiles, on s’est régalés d’une belle navigation dans le canal du Bordelais, 6 km d’eau entre les îles de Tahuata et Hiva Oa. Pourquoi ce nom ? fichtre, je n’en sais rien, mais quel bonheur de naviguer sur une mer portante avec peu de vagues, et un bon vent soutenu .. entre 13 et 23 nœuds, les rafales nous faisant flirter avec une vitesse à 9 nœuds, bonheur !!! Un mahi mahi est venu titiller le poulpe, a voulu croquer dans l’hameçon, et finalement a décidé de ne pas se laisser prendre. Flûte !

On longe la côte ouest de Hiva Oa, avec le sentiment d’être complètement ailleurs qu’aux Marquises. Ici la terre est rouge brun sombre, sèche, parsemée de buissons morts, blancs, parsemant le territoire sec de leurs touffes floconneuses. Quand les langues de terre se glissent dans la mer, parfois on les voit tranchées comme une miche de pain à laquelle on aurait retiré l’entame. On pourrait être à El Hiero, dans les Canaries, ou à Fuerte Ventura. Un peu le même paysage désertique, volcanique, montagneux.

Au détour du cap de KiuKiu, on aperçoit deux petites anses bordées d’un liseré de terre plus claire. Un nuage vert posé au fond de chaque petite baie, quelques têtes de cocotiers, promesse d’une oasis … c’est peu dire ! A peine débarqués, on découvre une toute petite vallée bien entretenue, terre noire sablonneuse, quelques baraquements et une ou deux petites maisons en bois, des chemins bordés de pierres de basalte noir, avec profusion de manguiers, pamplemoussiers et citronniers. Une jolie source d’eau transparente et douce dégringole de la montagne entre les pierres volcaniques noires, saute de chute en chute, et finit par atteindre une jolie vasque naturelle, arrosant au passage taros, bananiers, cocotiers et autres arbustes bien portants. Sous les bananiers, un petit banc invite à la contemplation. Les cocos entassées dessinent les contours de ce jardin d’eden tout joli. Adam et Eve ici s’appellent José et … je n’ai pas retenu le nom de sa femme, qui s’est présentée de son nom marquisien mais ne nous a pas donné son prénom « européen », il est sculpteur et travaille en ce moment des lettres en bois pour l’armée -SMA et autres acronymes (Service Militaire Adapté)-.

 

Ils sont 10 par ici, période de vacances. Normalement seuls 2 couples vivent à l’année dans cette baie, ouverte sur les courants du nord-ouest. Pas de coucher ni de lever de soleil ici, la baie est trop enclavée dans les falaises. Pas de route pour venir de Atuona, il faut compter 6 heures de marche, avec des passages dans la montagne en s’accrochant à des cordes. Seule possibilité : rejoindre la ville par bateau, et il faut compter 1 heure de voyage. Quand on peut débarquer à Hanamenu … puisque les vagues elles aussi s’invitent à terre, et parfois la houle est trop importante, inonde tout et empêche tout débarquement.

Pas d’électricité non plus (si si, ils ont des panneaux solaires pour les congélateurs), pas de téléphone, le réseau ne passe pas, pas de radio ni de télé, juste la nature au rythme de la nature.

Les enfants jouent dans le sable noir, les femmes discutent ou regardent le large ensemble, la vie est douce, simple, et passe lentement. « On verra bien » revient souvent dans les ébauches de discussion. C’est bien vrai, ici c’est dur de faire des projets, de prendre des engagements, quand tout dépend de l’état de la mer (la pêche, le trafic maritime, le tourisme, le commerce, le simple fait de se déplacer). « Normalement, mon père devrait revenir me chercher vendredi, mais on verra bien, ça sera peut-être dimanche » …

Le mouillage est rouleur, le vent est farceur, on a mis une ancre arrière pour tenter de rester dans un mouvement de bateau acceptable. On a donc deux ancres à l’eau. Celle-ci est brune, opaque, dense, on ne voit pas à 50 cm, le sable est noir, et on a vu passer un requin (il parait qu’il y en a plein) ; alors j’espère que nous n’aurons aucun problème pour partir demain matin …

Vendredi 28 octobre 2022 – Baie de Hanaiapa

Après Hanamenu, nous voici à Hanaiapa. Demain, ça sera Hanatekua. « Hana », du nom d’une princesse locale, et « Tekua » qui veut dire « travail ».

Ces trois baies du nord-ouest de Hiva Oa sont surprenantes : peu larges et plutôt profondes, enclavées entre leurs parois de terre et pierriers de roche brune poussiéreuse tombant abruptement dans l’eau pétrole, tant sur la droite que sur la gauche, elles ont toutes un petit ru, une petite rivière qui coule depuis les hauteurs, et qui permet ces petites oasis de verdure nichées dans ces déserts montagneux.

Quelques 8 miles séparent Hanamenu de Hanaipa, on les parcourt jouyeusement (c’est comme ça qu’on joue joyeusement, non ?) nez dans le vent, mais à la voile quand-même ! bon, oui, appuyés par le moteur, mais au moins on navigue. La côte grimpe en vallées pointues jusqu’à une ligne de crête toute dentelée, roche brune, parfois grise, c’est sec, archi sec. Parfois une tache verte, un arbre a réussi à survivre. Beaucoup sont morts, et leurs carcasses blanchies peuplent les pentes. Les pentes ressemblent parfois à un soufflé au chocolat retombé, à une peau de rhino croûtée de boue, ou à celle d’un éléphant camouflé.

La côte est très découpée, on passe rapidement de caps en baies.

Paysage désertique, plus brun et vallonné que gris lunaire, quelques silhouettes arbeuses se dessinent en ombres chinoises, telle la crinière courte et végétale des crêtes nous surplombant.

Les yeux fouillent la terre à la recherche d’une structure dans ce relief, comprendre ce terrain n’est pas aisé, les plans de roche se distinguent à peine les uns des autres, par une nuance de brun un peu plus ocre ou un peu plus rouge, ou simplement un peu plus clair. Le vert des arbres s’est échappé vers les hauteurs, tout là haut, loin de l’eau.

En cherchant à comprendre ce terrain, je me souviens d’un jeu d’enfant sur les plages bretonnes : remplir un seau avec un mélange d’eau et de sable très fin, en prendre une poignée pleine, fermer la main, la tenir verticale, le pouce vers le haut, pour laisser le sable et l’eau s’écouler par l’espace laissé libre par le petit-doigt enroulé sur lui-même … le sable mouillé tombe, et une sorte de stalagmite se forme lorsque l’eau continue son chemin vers les profondeurs … selon notre patience, nous pouvions former de magnifiques constructions. C’est ce même genre de « couches successives » qui forment ce drôle de relief.

On s’est arrêté une nuit à Hanaipa, pour y découvrir un mini village (100 habitants), une église et une fontaine, un bord de mer accueillant avec des jolis bancs de bois peints au bord de l’eau, pour ici aussi, admirer la nature. Les pirogues à balanciers reposent sur la plage de cailloux noirs. Structures hyper simples, robustes et sans finesse, elles permettent aux habitants de pêcher, de transporter les sacs de coprah, et surtout de se déplacer. Aucune route ici, aucun moyen de passer rapidement d’une vallée à l’autre par la terre, hormis passer « par-dessus l’arête » à pied sur les pistes caillouteuses. Ce qui prend du temps.

On a été invités par Amanda et Robin (bateau Morgane, www.morgane.ch) pour aller partager un Kai Kai chez Jean-Yves, un ami marquisien avec qui ils ont passé beaucoup de temps. Il habite face à la mer, sur la grève, et comme le climat le permet ici, les maisons sont très simples, spartiates et aérées.

Devant la maisonnette de Jean-Yves -posée à même le sol, composée d’un rectangle de planches en bois chapeauté par une tôle brune toute pointue montant haut dans les arbres- on était une bonne douzaine, assis sur des chaises en plastique de couleurs variées, devant quelques tables mises bout à bout, sous les feuillages rafraichissants. Beaucoup d’hommes, 3 femmes seulement, une marquisienne et deux petites suisses. La prière a précédé le repas, menée par le demi-frère de Jean-Yves qui vient d’arriver de Tahiti. Et puis c’est parti, après le silence et le recueillement, tout le monde se met à causer et à manger. Avec les doigts s’il vous plait, si vous voulez faire honneur aux hôtes marquisiens qui vous accueillent.

On partage, on découvre, on discute, on rigole, ça cause politique, voyages, héritage des terres familiales, cuisine, bref, on parle de tout et le temps passe avec délicatesse.

Le Kai Kai, c’est le repas. Au menu : cochon salé (avec encore les poils noirs sur la couenne), chèvre au lait de coco, thon cru au lait de coco ail et tomate, riz, bananes rio cuites, cake aux lentilles, salade de pommes de terre maïs et oeufs, et puis pour le dessert : un pot de 5 litres de glace (vanille, chocolat, taro), gâteau à la courge et tarte aux poires (faite par ma pomme, renversée dans l’annexe lorsqu’on a débarqué à terre, et à peu près sauvée). Sans bière ni alcool, mais eau de source et jus de mangue.

 

Et puis après ce repas gargantuesque, on passe aux choses moins sérieuses, mais très sérieuses quand-même : la pétanque ! c’est un peu le sport national ici. Et … ils sont sacrément doués ! On joue à 4, à tour de rôle, mais pas en équipe. Le premier qui atteint le score de 6 points gagne la partie. Jean-Yves, Tino et Valérie sont tellement précis dans leurs tirs, qu’il est fréquent qu’une partie se termine en deux rounds. Hervé et moi, on fait un peu pâle figure, alors qu’Amanda et Robin ont quelques mois de pratique d’avance, et ça se voit.

Après le dèj et la pétanque, qui se terminent tard, c’est retour au bateau, où on s’écroule à force de se faire chahuter dans tous les sens. Une vraie machine à laver, le mouillage est hyper rouleur. Donc demain, on changera de baie après la rando ! Yipeee, on va marcher demain !!! Me réjouis !

Samedi 29 octobre 2022 – Baie de Hanatekuua

Avant la rando, il faut quand-même que je vous raconte … l’hospitalité marquisienne n’est pas un vain mot.

Lorsque nous sommes arrivés hier (ou avant-hier) à Hanaiapa, sur le coup de midi, on a -comme d’habitude- sorti les jumelles pour regarder d’un peu plus près où débarquer avec le zozo, et ce qui se trouve à terre. Quelques petites maisons, quelques abris, des jolis bancs en bord de mer, et puis un autre « bungalow » près duquel étaient regroupées plein de personnes à l’ombre des arbres, attablées, semblant discuter joyeusement.

On se dit « chouette un snack, on va aller croquer quelque chose ». Ni une ni deux, on met le zozo à l’eau et nous voilà partis tout réjouis à l’idée de goûter quelque chose de nouveau.

On mouille l’ancre arrière du zozo, on débarque à terre, on amarre l’aussière dans les rochers en manquant de glisser sur les marches algueuses, et on part à la découverte de ce snack local. Le village est petit, alors on se dit qu’on a de la chance … On arrive sur place, on voit que toutes les tables sont occupées, on dit bonjour -enfin, Kahoa ! – et on avance vers une femme qui est proche du buffet – casseroles et autres plats de service (c’est notre interprétation) -. On lui demande si on peut manger quelque chose chez elle, et elle nous regarde, ils nous regardent tous en fait, et …

-elle nous dit : Kahoa nui à vous, b’en, euh, … écoutez, là vous êtes chez nous, sur un terrain privé, on est l’antenne locale des Témoins de Jéhova, on vient de faire la prédication et on partage maintenant notre repas 

-et nous : oh, désolés, on ne savait pas ! on a cru que c’était un snack ici, et c’est pour ça qu’on s’est permis de te poser la question ! on ne va pas vous déranger, on s’en va.

-elle : non, non, attendez, vous pouvez rester !

Puis deux autres femmes arrivent et nous entreprennent, nous souhaitant la bienvenue, nous intimant l’ordre de nous asseoir l’un à côté de l’autre devant les casseroles, face à elles. Pas trop le choix devant leur évidence à nous accueillir. On s’installe avec elles, elles nous présentent quelques personnes de loin, d’autres de plus près, puis nous invitent à nous servir. Dans les mets préparés, on retrouve les classiques dun kai kai marquisien, et puis aussi le poisson cru (sardines entières, coupées en tronçons avec leur peau et leurs arêtes, avec un peu de lait de coco, je passe mon tour), crabes crus simplement coupés en deux -sur lesquels tu presses un peu de citron, je n’ai pas goûté-, farcis de poissons (délicieux !!), uru cuit (fruit de l’arbre à pain, équivalent d’une pomme de terre de la taille d’un pomelo), puis poe (purée de fruits épaissie à la farine d’amidon -2/3 purée de fruits frais, 1/3 farine d’amidon, ils préparent ça avec n’importe quel fruit), gâteau banane et salade de fruits frais, y compris des ananas locaux.

On passe deux bonnes heures à discuter avec chacune (les hommes ne viennent pas trop à nous), elles nous racontent leur vallée, leurs habitudes, leurs recettes de cuisine, leur famille (en fait, ils font un peu tous partie de la même famille…), en toute simplicité, et bien sûr nous assaillent aussi de questions.

Chouette moment !

Sinon, quand on ne mange pas, on se balade un peu à pied dans ces déserts minéraux, et on a fait l’aller-retour jusqu’à la magnifique anse de Hanatekuua. 12 km, 400m de dénivelé, la marche est belle et agréable, à l’ombre des arbres. Force est de constater à quel point la terre a soif ici … les arbres ne sont que squelettes, les quelques buissons ne retiennent pas suffisamment d’eau pour que de l’herbe pousse, les chèvres vaquent dans ces valons arides, les poules et les coqs s’appellent inlassablement, et lorsque que nous atteignons le fond des vallons plus arborisés, forêts de manguiers et autres cocotiers, alors le pépillement et le chant des oiseaux s’élèvent à nouveau.

Hanatekuua, petite crique assez large et profonde, qui permet d’imaginer un mouillage moins rouleur, … nous y reviendrons avec Myriades quelques heures plus tard pour une nuit un peu plus confortable.

Hanatekuua, petit coin de paradis de sable blanc, doux, non non, pas de la soupe de corail mais bel et bien du sable. Plage bordée de cocotiers, petite langue de corail qui attire quelques poissons, une ou deux petites maisons et les séchoirs à coprah, à la limite de la végétation quelques touristes ont planté la tente (c’est pas fréquent par ici), pendant que d’autres ont débarqué pour la journée en pirogues locales. Une plage comme ça, c’est rare aux Marquises ! L’eau turquoise est à température parfaite, le soleil pas trop chaud, quelques arbres nous permettent de picniquer à l’ombre, et de savourer une petite pause bien sympa avant de rebrousser chemin.

Les hommes qui vivent ici pendant la semaine travaillent chacun sur les terres familiales, nettoient les cocoteraies, ramassent les cocos, les cassent et les mettent à sécher, puis les mettent en sac de jute de 25kg, pour qu’elles soient acheminées à l’huilerie de Papeete pour y être transformés en huile. Lorsque la semaine est finie, ils « remontent en ville » c’est-à-dire qu’ils font les 2 heures de marche jusqu’au village de Hanaiapa de l’autre côté de l’arête (ou rentrent en bateau) où vivent leurs familles.

De retour au bateau, on décide donc d’aller se mettre au calme dans la baie de Hanatekuua, et comme d’hab il faut aller remonter l’ancre arrière … Il est fréquent qu’on doive sur mettre sur deux ancres, pour rester perpendiculaire aux vagues, même si le vent voudrait nous faire partir dans toutes les directions ; ne surtout pas être parallèles aux vagues et à la houle, rien de pire pour dormir … Et comme ça souffle pas mal par ici, le bateau tire bien sur ses deux mouillages. Donc quand on veut partir, on commence par 15 minutes de zozo à fond la caisse pour déloger l’ancre arrière de la vase et du sable dans lesquels elle s’est enfoncée, dans lesquels elle reste collée, aspirée par les fonds … La première fois on était inquiets de ne pas pouvoir récupérer notre mouillage, la seconde fois, on l’était un peu moins et plus patients, et maintenant on sait que ça nous prend un quart d’heure pour la remonter à bord …

Et pendant la manœuvre, 6 raies manta en groupe viennent se nourrir près de nous et tourner indéfiniment en cercles, à la queue Leuleu (comment ça s’écrit ça ??? ). Magie des lieux.

Et puis en vrac, dans les jolies phrases et rencontres marquisiennes :

Deux jeunes femmes sur la plage de Hanamenu nous disent que ce soir, elles vont allumer un feu de camp sur la plage … je leur demande si c’est pour un bbq, elles me répondent en rigolant que non, c’est simplement pour savourer le temps qui passe et regarder la nature.

Firmin, à Hapatoni, sculpteur sur bois qui « maudit » ses enfants « des flemmards, ils travaillent l’os, c’est bien plus facile ».

Karen, à Hapatoni, quand on veut lui payer les avocats qu’elle a cueilli pour nous « non non, je ne prendrai pas ton argent, de toute façon c’est l’arbre des voiliers ».

Tehono et Teuia, Juliette et Thierry (de leurs noms français) qui en s’asseyant nous disent « kaï kaï ma i taï (bon appétit), c’est un repas tout simple, c’est ce qu’on mange chaque jour entre nous » alors qu’ils nous servent du poisson cru au lait de coco, du poulet au curry et papaye, des bananes croustillantes, du riz, des ananas, pamplemousses et papayes, le tout arrosé d’une cruche de jus de pamplemousse fraichement pressé, avec un immense sourire.

Cyril, sculpteur, tatoué des doigts de pieds jusqu’au menton. Il façonne les os avec une incroyable dextérité, finesse et délicatesse.

Atanase, à Omoa, qui nous invite à venir à la messe à 17h, « je sais c’est à quelle heure, c’est moi qui sonne ».

Teuia encore, alors que nous gravons nos tikis, se fait le Manu (manou, le messager) de la bonne parole « le mensonge est parti de bonne heure ce matin, et la vérité le rattrapera en chemin »

Heikua, graveur à Hapatoni, qui nous sort 2 dents de cachalots sur lesquelles il va réaliser ses prochaines œuvres … facilement 800gr à 1kg chacune, grosses comme deux belles aubergines. D’habitude on les voit plutôt sculpter sur des os de bœuf, de cheval, des dents de cochon, des rostres d’espadon ou de marlin, mais le cachalot, c’est une première.

Une femme, à qui nous demandons s’il est possible de lui acheter quelques fruits « oui, je vais aller casser la mangue et le pamplemousse pour toi ».

Line, artisane à Atuona, qui me raconte qu’elle vient de Puamau (Pouamaou), et qu’elle est issue d’une dynastie de reines et de cheftaines. Le pouvoir se transmettait principalement par les femmes. Line grave différents objets à partir de noix de coco, fait des bijoux très délicats avec des motifs marquisiens, tout en me racontant un peu l’histoire de sa famille, de sa tribu, des mœurs marquisiens (marquisiennes ?). Je lui demande s’il est vrai que les Marquisiens ont été féroces, sauvages, voire cannibales, et goguenarde elle me répond « b’en oui, évidemment ! » avec un immense sourire édenté. Et elle s’empresse de mettre un peu de contexte autour de cette voracité, en expliquant que seuls les trophées de guerre étaient mangés : les chefs et dirigeants des villages étaient des mets de choix lorsqu’ils étaient capturés, et ils étaient alors consommés lors de rituels ; le cerveau et le cœur revenaient au roi et à la reine, ils rendaient ainsi honneur à l’intelligence et à la force de leur victime, et s’appropriaient leur « mana », ingéraient leurs qualités. Puis les épaules, les bras, le dos étaient offerts aux notables, et chaque « étage » des hommes étaient distribués en fonction de la caste à laquelle chacun appartenait, jusqu’au dernier des doigts de pieds.

Mardi 1er novembre 2022 – Célébration du Turamara’a, le jour des défunts

En ce 1er novembre polynésien, les morts sont célébrés et honorés dans la joie, la musique et la lumière.

Nous découvrons comment, lors de la Toussaint, les Polynésiens célèbrent le Turamara’a, quelles traditions les lient à leurs défunts, et comment ils les fêtent.

Le mot Turamara’a vient de “lumière”, “éclairer” et “clarté”. Il est associé à cette cérémonie où les tombes sont illuminées de bougies et de sable blanc, et parées des plus belles fleurs locales qui déploient leur parfum dans la nuit …

De la naissance à la mort, il semble qu’aux Marquises et en Polynésie, la notion de « continuité de la vie » et de « l’affinage progressif de l’âme » soient des notions très importantes. Les rites qui entourent la naissance et la mort ont un certain nombre de similarité, et il est normal ici, lorsqu’une personne décède, de continuer à vivre la relation qui nous liait à elle comme si elle était encore vivante. Les gens parlent à leurs défunts et les interpellent sur différents sujets, prennent soin de leur tombeau, leur adressent mille prières et prennent place régulièrement, assis sur le bord des tombes, pour partager un moment avec les proches disparus.

En ce 1er novembre sur l’ile de Tahuata, nous sommes venus assister au Turamara’a à la tombée de la nuit. Le cimetière de Hapatoni scintille de mille feux, les bougies ornent les tombes recouvertes de sable blanc, et leur flamme vacillent dans l’air tranquille. Les fleurs embaument la nuit, envahit les sens. Les bouquets olfactifs composés de basilic sauvage, d’ananas au santal, de tiaré, d’ylang ylang et autres fragrances florales régalent les esprits et les narines des vivants. Les compositions florales rouges rajoutent à l’intimité du moment, les tissus fleuris et colorés des femmes rayonnent dans l’obscurité, les couronnes de tiaré habillent les têtes et les croix blanches.

Après la prière du soir dans l’église (la messe a eu lieu ce matin), chaque famille endimanchée rejoint le petit cimetière pour prier et chanter sur les tombes de leurs défunts. Parfois des tombes personnelles, parfois des tombeaux multigénérationnels. Autour de chaque tombe, au bord de chaque pierre tombale, se tiennent petits et grands, assis du bout des fesses ou debout collés-serrés. Ensemble, ils rendent hommage à leurs proches.

Un calme serein nous envahit. Les prières de chacun, chuchotées pour soi puis chuchotées tous ensemble, telle une litanie, invitent au voyage intérieur. C’est paisible, c’est dense, c’est plein, c’est un moment magique.

Hier la cueillette des fleurs, ce matin le tressage des couronnes et la confection des bouquets, ce soir les prières et les chants, la célébration des morts est une vraie histoire de vie et de partages.

A la fin de la veillée, chacun rentre chez soi, et Sarah, 60 ans, reste un peu avec nous. Elle s’assied sur le bord de la tombe de sa belle-sœur, et nous raconte quelques bribes de l’histoire des familles qui peuplent cette vallée, qui descendent de deux sœurs, dont l’une est sa grand-maman. Elles ont eu chacune 10 et 12 enfants, qui ont tous pêché leur âme-sœur sur d’autres îles avant de revenir s’installer dans ce havre de paix qu’est Hapatoni. Tout le monde est le cousin-la cousine de son voisin-sa voisine. On ne peut citer un nom sans que Sarah nous explique son lien de parenté avec cette personne, c’est rigolo.

Par rapport au Turamara’a (Fête des Morts), elle évoque les différentes époques et les gens qui les ont influencés, comme certaines personnes qui dans les années 80 achetaient leurs fleurs synthétiques à Papeete et rentraient dans une sorte de concours pour savoir qui avait « la plus belle tombe » ; et puis il y a une bonne trentaine d’année, une de ses tantes a relancé l’esprit d’artisanat et a incité tout le monde à planter des fleurs sur son lopin de terre, faire pousser soi-même fleurs et arbustes multicolores aux feuilles à multiples formes, puis leur a appris à tresser, à composer, à créer de beaux arrangements pour qu’aujourd’hui, ce soit à nouveau des coutumes locales et que tout ce qui honore les anciens d’ici soit produit ici, entretienne et fasse perdurer le lien à la nature.

Elle nous explique aussi que la vie ici est très communautaire, les différentes activités nécessaires à l’entretien du village se partagent et s’assument à tour de rôle. Une semaine tu es de nettoyage de l’église, la semaine d’après tu ramasses les feuilles sur le port, celle d’après tu entretiens le faré d’artisanat, puis vient ton tour de préparer la liturgie et d’être le meneur-la meneuse pour les répétitions des chants, ou de travailler les fruits ramassés, et tout ça en plus évidemment de l’entretien de ton propre faré (ton bâtiment, ta hutte, ta maison), de ton travail (elle est assistante maternelle à la petite école), du temps que tu dévoues à ta famille, de la préparation des repas, etc… C’est long ici de préparer un repas, quand tu dois tout faire de tes propres mains de A à Z … par exemple, le lait de coco : nous Européens, on ouvre une boite de conserve et on la verse dans la casserole, 2 minutes maximum. Ici, tu vas casser la coco (la cueillir), tu lui enlèves la bourre, tu la fends, tu la râpes, tu essores 3 ou 4 fois la pulpe râpée dans un torchon pour en retirer le lait, et enfin tu peux verser le lait dans ta casserole. Au bas mot, ½ heure. Au bas mot. Et le lait de coco, ils en mettent dans presque tous leurs plats.

Et pendant qu’elle nous raconte tout ça, elle se roule une petite cigarette, invective son neveu pour qu’il lui passe son briquet, recoiffe ses longs cheveux noirs pour les remettre en chignon, lisse sa robe « mission » avec délicatesse, et nous confie à voix basse que c’est vraiment le plus bel endroit au monde, et qu’elle est profondément heureuse ici. Il y a tout, pour tout le monde, la vie y est facile, la générosité et la solidarité y sont fortes.

Jeudi 3 novembre 2022 – Baie de Hanamoenoa (ca y’est j’ai réussi à m’en souvenir !!)

Au programme d’hier : balade à terre pour se décrasser le palpitant et se faire bouger les gambettes dans une nature majestueuse. 500 mètres de dénivelé positif, 12 km, 3 heures 30, le début est raide ! Une fois qu’on a franchi les 300 premiers mètres d’altitude, la suite est sympa. Retour avec un régime de bananes sur le dos et 3 pamplemousses dans le sac, plus quelques citrons pour le ti rhum, c’est parfait !

En arrivant au bateau, on rêvait de se baigner pour se délasser les jambes et se rafraichir, et en fait, il y avait tellement de plancton dans l’eau qu’on avait l’impression de nager dans un … dans une … dans une espèce de gelée, un truc épais et franchement désagréable, qui de plus nous piquait la peau. Donc au bout de 10 brasses, on est vite ressorti de l’eau.

Et puis aujourd’hui, visite aux artisans graveurs (sculpture sur os principalement) et cueillette d’avocats, puis retour à bord pour aller pêcher. Nous n’avons plus de poisson au congelo, il faut qu’on remplisse un peu le frigo. On a bien passé 2 heures à tourner au moteur, proches des dispositifs de pêche (bouées fixes avec des nasses qui attirent et favorisent le développement de la vie sous-marine), aucune touche ! nada ! Vivement le prochain déplacement après-demain pour remettre les lignes à l’eau, et tenter d’attraper un mahi-mahi ou un thon … On croise les doigts !

Dimanche 6 novembre 2022 – Au mouillage à Hapatoni

J’ai passé la fin de journée sur le pont, à regarder l’astre magique poursuivre sa course jusqu’à toucher l’eau, puis plonger dedans sans bruit avec délicatesse, rebondissant derrière les nuages.

Détente au rendez-vous, sérénité relative, que je questionnais … à quoi tient-elle, qu’est-ce qui fait que je suis calme intérieurement ce soir, alors que certains soirs tout bouillonne en moi, et la marmite à peine à retenir la pression …

Les multiples options :

. La sérénité et le Mana du lieu
. J’ai parlé à mes fils récemment et j’ai des échanges avec eux, même si trop frustrant par moment parce qu’on n’arrive pas à tout ressentir et tout deviner et tout partager
. Pas de vent et pas de mer, le plan d’eau est super calme
. J’ai parlé à ma sœur ce matin
. Il y la réjouissance du retour « à la maison » en perspective
. L’intensité du coucher du soleil était nourrissante et pleine
. J’ai cheminé, oui, et je suis plus capable de vivre le « là, ici et maintenant »
. Je laisse aux autres la responsabilité de ce qu’ils ont envie de vivre sans que cela m’affecte (ça reste difficile, mais je progresse)
. Je suis plus apte à naviguer et à composer avec ce qui est, quand cela est, sans réfléchir à tout ce que je n’ai pas et que je ne suis pas
. J’accepte plus facilement de ne pas me projeter, et j’ai moins besoin de me projeter, j’en viens presque même à penser que je ne veux plus me projeter
. Je commence à m’auto-suffire (j’en doute sérieusement, rien que de l’écrire me fait rire)
. Le verre de rosé fait son effet (d’autres couchers de soleil s’accompagnent d’un petit rhum). Tiens d’ailleurs, je vais aller m’en servir un deuxième petit, pour la route

Mercredi 9 novembre 2022 – Ca y est, le compte à rebours est lancé!

 B’en voilà une nouvelle saison qui touche à sa fin. À nouveau 8 mois passés sur le dos et dans le ventre de Myriades, à se faire balloter de droite à gauche, ou bercer selon les heures, à savourer le plaisir de l’inconnu tout autant que celui de revenir sur certains de nos pas dans des lieux magiques.

L’heure n’est pas au bilan, mais aux derniers plaisirs : encore une baignade à Hanamoenoa, baie de sable blanc bordée de cocotiers, une marche entre les deux villages, le plaisir d’un snack au bord de l’eau où tous les clients jouent le rôle des serveuses et se mêlent de tout, ce qui permet de passer de joyeux moments, un dernier coucher de soleil dans ce ciel mauve et lumineux de bout du monde, un dernier plouffff ce matin dans une eau exceptionnellement limpide, quelques derniers bords sous voile par 18 noeuds dans une mer relativement calme, … et nous voilà de retour à Atuona pour préparer le bateau à sortir de l’eau. La manœuvre aura lieu jeudi, après-demain, à 6h du matin, bonne heure pour la marée. Comme tout le monde le sait, les marins sont en mer dès l’aurore …

Myriades a laissé tomber sa garde-robe cet après-midi, les voiles sont prêtes à être déposées au chantier pour en confier les réparations au voilier-couturier ; restent à faire deux trois petites choses, haha, comme les vidanges et les hivernages, le tri des coffres, le nettoyage de l’intérieur des cales au plafond, et puis préparer nos valises, mais pour ce dernier point, ça sera samedi soir à minuit, comme d’hab, avec l’avion qui décolle lundi matin.

Donc pas le temps de s’ennuyer, on est dans les préparatifs et la réjouissance de retrouver ceux que nous aimons, et d’ici là on vous embrasse fort !

One comment

  1. Chère Mélanie, cher Hervé,
    Merci de nous faire voyager et rêver !
    Je me régale de ce JDB si poétique et bien fait en le lisant sur l’ordi, avec Google Earth sur la tablette pour suivre les parcours, c’est super.

    Bonne continuation, profitez un max, en espérant avoir l’occasion de vous revoir en Suisse.
    Amitiés,
    PA (nostalgique de la SPI Dauphine)

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