Samedi 3 septembre 2022 – Incroyable, déjà septembre … !!!

Ces derniers jours ont été délicieux et fort sympathiques !!! Nous sommes au mouillage avec quelques 5-6 autres bateaux pas très loin -mais suffisamment éloignés quand-même pour prendre une douche tranquille au cul du bateau sans être gênés- parmi eux des suédois, des allemands, des américains, des canadiens, des personnes de 3 à 70 ans en gros, belle représentation d’âges et de genre.

La super surprise qui fait que ces derniers jours ont été un régal, c’est qu’ils kitent pratiquement tous ! donc chaque jour, on était entre 2 et 7 kiteuses.teurs à naviguer sur le plan d’eau, à s’observer, apprendre de l’autre, se tirer la bourre sur des bords de vitesse, tester des nouvelles approches du kite, et partager ce plaisir commun.  Le matin, on se disait « bonjour, comment ça va ce matin ? » sur le bord babord, et quand on revenait sur le bord tribord on entendait « super bien, merci ! Et toi ? en forme ? » Bon esprit, chouettes rencontres autour d’un ou deux barbecues sur la plage en fin de journée, ça fait du bien de retrouver un peu de vie en société ! La plus jeune kiteuse a 14 ans, et elle est sacrément mordue ! A peine le temps de croquer dans un sandwich à midi, elle passait ses journées sur l’eau, à tester ses transitions, à aborder les sauts, avec toute la timidité de sa silhouette frêle, et pleine de volonté et de détermination.

On a quitté Makemo quand le vent s’est calmé un peu, histoire de nous permettre de faire la navigation le nez au vent de la manière la plus douce possible. Une longue nuit inconfortable, quelques 80 miles parcourus, une touche au bout de la ligne qui n’a pas voulu poursuivre sa route avec nous (flûte, le frigo restera vide de protéines marines), la dernière nuit en mer avant la prochaine longue nav (dont je ne me réjouis absolument pas, même s’il me tarde d’arriver aux Marquises).

Mardi 6 septembre 2022 – Makemo, au village de Pouheva

Herve et Melanie sont en bateau,
À Makemo,
Il y fait beau,
Mais plus très chaud.

 

 

Aujourd’hui à Makemo, c’était jour « activités ménagères », lessives en attendant l’arrivée du bateau ravitailleur, et courses pour remplir les frigos en vue de nos deux prochaines semaines loin de tout, au bout sud-est du lagon.

Le bateau ici passe tous les 15 jours, et quelques produits arrivent aussi par avion.

Pour les 1000 habitants, sont arrivés 5 kg de tomates, 5 kg de carottes, 3 kg de courgettes, autant d’aubergines, 3 poireaux (oui 3 poireaux, pas 3 kg de poireaux), 4 paquets de salade, 5 kg de pamplemousses, autant d’ananas, 6 avocats, 10 saucissons secs, 10 sachets d’emmental râpé, des kiris et des paquets de fromage orange pour hamburger … et puis des produits secs, riz, pâtes, ketchup, coca, …

Une cultivatrice sur l’île fait pousser quelques salades et un peu de pota (une espèce de pack-choï), chacun a son bout de terrain qui lui permet quelques végétaux locaux, et ils ont surtout des gros congélateurs. Autant dire que les menus des habitants ici ne sont pas très variés, et vu les prix ils mangent peu de légumes.

Comme je suis arrivée au magasin 1 heure avant l’ouverture (me suis légèrement trompée) j’ai poussé la porte de la réserve et j’ai proposé mon aide pour mettre les produits en place dans les frigos, les rayons, etc … ce qui m’a permis de discuter avec les louloutes locales, c’était super sympa, au frais des frigos. Elles m’ont bien confirmé que tous les produits frais sont principalement achetés par les Frannies, les Popas, les Métros, profs, voileux, mais que pour eux, ce sont des produits rarement accessibles.

Voilà pour un petit stop rapide à Pouheva, et demain matin on lève l’ancre (en espérant qu’elle ne reste pas coincée par une grosse patate) pour aller se mettre à l’abri des vagues au sud-est du lagon, et profiter du vent pour kiter, kiter, kiter …

 

Mercredi 14 septembre 2022 – Raroia, devant le village

Oh que mon dernier post était optimiste quant à la météo … une fois de plus !!! Une fois de plus les prévis et la réalité n’ont rien eu en commun … Hervé a pu lancer la voile une fois en l’air, moi de même, dans un contexte hyper « choppy » et « gusty », donc des vagues et surtout des rafales et des rafales … le vent passait de 9 à 30 sans crier gare, autant dire que c’est compliqué dans ces conditions de savoir quelle voile gonfler, et quand l’envoyer … donc on n’a quasi pas pu kiter.

Donc nous avons patienté, dans un lagon qui nous a offert l’année passée les plus magiques étendues d’eau turquoise que nous ayons jamais vues, si peu profondes qu’on avait tous les fonds de sable en transparence … c’était notre second atoll paumotu à l’époque, on s’en mettait plein les yeux dans ces moments éblouissants des premières découvertes. Cette année, nos progrès en kite et nos nombreuses balades dans les atolls élèvent notre degré d’attentes, d’ « expectations ». Pour éviter de tourner en bourriques et ne pas sombrer dans la frustration (ce serait dommage d’être frustrés au paradis, quand-même), on a varié les plaisirs et on a tenté d’innover : nous nous sommes essayés au tissage de feuilles de cocotier.

Hervé a réalisé un chapeau, et moi un petit panier. Il faut d’abord aller chercher la bonne feuille sur un cocotier, la choisir suffisamment grande et suffisamment souple, qu’elle soit à bonne hauteur pour être sciée, puis la ramener au bateau. Là, couper la tige sur une longueur suffisante pour un tour de tête, puis couper la longueur retenue en deux pour obtenir deux rameaux tissables.
Il faut maintenant affiner la tige pour qu’elle s’assouplisse, et après, c’est une affaire toute simple et répétitive : passer dessus-dessous, puis dessus puis dessous, et encore dessus-dessous, avec chaque brin de feuille, jusqu’à ce que le chapeau prenne forme, ou que le petit panier sorte de sa boite. C’est sympa à faire, ça occupe, ça nous oblige à focaliser notre attention sur quelque chose de très particulier pendant un moment, ça passe le temps et ça allège la tête. D’ailleurs, vous saviez que le fait de travailler avec nos doigts, et notamment la pulpe de nos doigts, est un excellent anti-dépresseur, calmant, voire lénifiant ?

On a fait connaissance de deux bateaux sympa, des couples entre 60 et 70 ans, et on a même eu droit à une pizza party : le bateau-hôte prépare la pâte, et chaque équipage apporte de quoi garnir une pizza à sa sauce, selon ses goûts et ses envies. Du coup, on participe tous et on goûte à de nouvelles choses. C’est le genre de choses plus faciles à faire quand on a un cata de 50 voire 55 pieds, il y a de la place pour tourner autour de l’ilôt central de la cuisine 😉 Chez nous c’est plutôt genre apéro dinatoire « collé-serré » autour de la table du cockpit.

Il y a un principe assez marrant en PF dans le milieu des voileux, c’est que chaque fois que tu es invité pour un apéro, ou que tu invites pour un apéro, chacun déboule avec ses bières ou sa boisson fétiche, et puis un truc à grignoter. Ca permet du coup de faire les choses hyper facilement et de manière super spontanée, car tu n’es pas obligé de passer au super-marché vite fait en rentrant du boulot pour acheter de quoi accueillir tes invités, donc chacun peut gérer ses stocks simplement, et ne pas voir ses stocks mis à sec après un apéro qui se prolonge un peu …

Donc on a quitté Makemo hier, mardi 13 septembre à 16h30. On s’est pris 20 nœuds en arrivant au village vers 11h pour aller chercher le pain commandé la veille, et on a remis notre départ en question … finalement, le vent s’est tassé et on a pu prendre la passe toute calme à 16.30. Des nuées d’oiseaux chassaient à l’extérieur de la passe, les paumotu pêcheurs étaient là avec leur 4-5 embarcations et leurs cannes, donc on a mis les lignes à l’eau, et on a fait des allers-retours devant la passe, passant au milieu des nuages d’oiseaux et des bancs de poissons, … eh b’en vous savez quoi ? zéro touche !! zéro poisson au bout de notre ligne … pffff ! déprimant !

La nuit s’est rapidement posée sur la mer -17.30 le soleil s’en va déjà de l’autre côté de la terre et le phare de Makemo s’allume- et le rythme de notre duo s’installe : l’un en veille, l’autre en sieste. Hervé est un peu pénible les premières 24-36 heures, comme en voiture d’ailleurs : il veut tout faire, tout contrôler, tout vérifier, ne pas dormir, donc … il dort peu. Donc je veille peu. Mince alors 😉 Du coup, b’en j’en profite pour rester tranquille et contrôler mon estomac. Bon, sur les navs plus longues, je veille autant que lui. Mais là, la nuit a été douce, les vents tranquillement posés entre 10 et 12 nœuds, d’abord venant plein nord, totalement imprévu, et puis finalement s’établissant à l’est comme prévu, voir est-sud-est, donc bien pour notre route. Et puis peu de vent donc peu de mer, et ça c’est bonheur !!! Donc on a bien dormi tous les deux, Hervé dehors et moi dedans au chaud, car oui ça caille !!! On est en hiver ici, les températures sont fraîches dès que le soleil se cache. On a ressorti les couvertures et les pulls.

Au petit matin, 5h30 le soleil vient nous dire bonjour, et la côte se profile : des cocotiers, des cocotiers, des cocotiers. Les lignes sont à l’eau, puisque le frigo commence à crier famine de protéines, et ô joie, les voilà qui sifflent ! mais mais mais pas tout à fait pour les bonnes raisons : 5h du mat c’est l’heure des JAC chez les jeunes fous (le fou est un oiseau …) : un JAC c’est un Jeu A la Con …

Donc leur JAC préféré : tenter de pêcher nos leurres, qui ressemblent évidemment furieusement à des petits poissons.

Première conséquence de leur JAC : voilà une ligne qui s’envole et nous nous retrouvons avec un cerf-volant, ou plutôt avec un fou-volant, puisque cet imbécile de piaf s’est pris l’hameçon dans la patte … il part haut dans le ciel, tente de passer à l’avant du bateau, … non non, pas devant !!! Hervé mouline mouline mouline pour le ramener sur le pont, mouline plus vite que le fou ne vole, et parvient à le libérer.

Comme une mésaventure ne suffit pas, voilà un deuxième piaf qui s’y met, mais lui, pour son malheur, part sous l’eau. On ralentit le bateau pour tenter de lui permettre de refaire surface, mais c’est un peu peine perdue … Hervé mouline à nouveau comme un fou (enfin, oui, non, rapidement quoi) et voilà le fou qui arrive comme une outre pleine, la gueule grande ouverte en avant, pendu à notre hameçon par le bec. Il n’est pas vigousse du tout, … il s’est rempli d’eau et le voilà qui pend lamentablement au bout de la ligne. Hervé le détache et le rejette à l’eau. Tout hagard, notre fou flotte cahin-caha, et puis on le voit relever la tête, l’œil rond ébahi, ouvrir le bec, et se vider petit à petit de toute son eau, par jets successifs. Il a eu de la chance celui-là !

Une fois les fous sauvés et repartis, on aperçoit la manche à air de l’aérodrome, puis, entre les cocotiers plus clairsemés, quelques maisons. La passe est calme, large, plate, mais peu profonde, donc l’alignement -sur les deux balises- ici doit être respecté. On s’engage, les lignes toujours à l’eau puisque les passes font partie des lieux de chasse préférés des animaux marins, mais peine perdue une fois de plus, pas un poisson au bout du fil !
Cette année, Hervé a pêché plus d’oiseaux que de poissons !!

Vendredi 16 septembre 2022 – Raroia, au mouillage Kontiki

Raroia City Center : quelques huit-dix maisons sont en front de mer, ou plutôt front de lagon, à l’abri des cocotiers et arbustes de petite taille. Ici les cocotiers sont assez clairsemés, plutôt que de former de gros buissons. Sur la jetée qui abrite la petite enclave où les potimararas et barques en alu viennent s’abriter des vagues, une montagne de bouées grosses comme des gros ballons de baskets, en plastique dur, certaines encore rouges, d’autres à la couleur complètement passée, effacée, gommée par trop de soleil. Ce sont les bouées utilisées dans les fermes perlières, pour suspendre les nasses contenant les nacres à la bonne profondeur.

Huit-dix maisons face à l’est, face à l’eau du lagon, et deux routes bétonnées (aussi larges que deux de nos trottoirs) qui desservent les quelques hectares de terrain de la commune. A gauche, la route qui mène à l’aérodrome passe devant l’école maternelle -construction à un étage, le rez étant complètement ouvert et permet simplement aux classes situées à l’étage d’être à l’abri de l’eau quand le lagon se déchaîne- puis la poste (sorte de bunker sur pilotis lui aussi, jaune et bleu comme tous les OPT de Polynésie) puis un autre bâtiment en dur qui abrite la mairie et ses services communaux. Quelques maisons faites de tôle, de troncs d’arbre, de parpaing et de bloc de corail, rideaux colorés qui volent au vent, sont disséminées le long de la route.

Huit-dix maisons face à l’est, face à l’eau du lagon, et à droite, la route qui mène à l’épicerie, à l’église et au cimetière. C’est assez rare de trouver un cimetière en Polynésie ! Coutume et tradition enterrent habituellement les morts chez eux. Leur tombe sont de temps en temps utilisées comme espace de rencontre, place centrale de la vie extérieure des familles ; le plus souvent elles occupent simplement un morceau du terrain, elles sont décorées, parfois ombragées, ourlées de coquillages et coraux. On entend souvent ici que la terre n’appartient pas aux hommes, mais qu’elle leur est prêtée. C’est donc plutôt l’homme qui appartient à la terre, à sa terre, et qui y retourne, sur son lopin de terrain.

Huit-dix maisons, face à l’eau, et un peu plus de domiciles entre les deux routes. L’atoll abrite une centaine de personne, 180 y résidaient avant le Covid. Mais Covid a fait partir beaucoup de monde, notamment les Chinois ; depuis, deux des trois fermes perlières ont mis la clé sous le paillasson, et leurs travailleurs ne sont pas revenus. L’industrie de la perle en PF dépend principalement des Chinois, qui sont ceux qui maîtrisent la greffe des nacres. Sans Chinois pas de greffeurs, sans greffeurs pas de perles, sans perles pas de travail. Les autorités ont mis sur pieds une école pour former les greffeurs parmi la population locale, mais les polynésiens ont de la peine à s’y mettre. Ils ne sont pas non plus les plus rapides au travail, ils sont souvent « fui » (fatigués, las, n’ont pas envie) et la dextérité chinoise de son peuple travailleur vaut de l’or.

Donc vraiment tout petit village.

On y a vu passer le maire sur sa bicyclette à trois roues, vieux débardeur violet sur le dos, semblant de short sur les fesses ; on y a vu quelques gens à pied, en vélo et tricycles, quasi pas de voitures, pas de scooter non plus.

On y a rencontré Gérard, le propriétaire de l’épicerie. Originaire de Nouvelle-Calédonie, il s’est installé ici il y a 12 ans. Son épicerie fait quelques 30 mètres carrés, contient 3 bahus congélateurs, 4 étagères sur lesquelles sont alignées les denrées coloniales et les produits ménagers, un fil auquel sont suspendus 4 shorts et 6 t-Shirts Quick Silver, et cinq boites de bonbons à l’unité. Au sol, un carton avec 3 kg de tomates, un panier rempli d’oignons et une caisse de pommes de terre, peut-être encore 4 kg dispo. Le cargo ravitailleur passe ici une fois par mois, et la prochaine ce sera le 5 octobre (dans 15 jours).

Sa femme paumotue, lumineuse, très à l’aise dans ses formes généreuses et pulpeuses, regard accueillant et chaleureux, est la première personne (depuis les Gambiers) qui nous a proposé de partager un moment avec eux. Ce que nous ferons certainement quand nous retournerons au village, car nous nous y sommes arrêtés juste le temps d’en faire le tour, d’acheter un poulet congelé et trois boites de raviolis, et puis nous sommes remontés sur Myriades pour traverser le lagon et aller nous coller à la bande de corail EST de l’atoll. Nous mettre à l’abri des vagues, pour y attendre le vent.

Et c’est donc là que nous sommes depuis hier matin, tout proches du motu où est arrivé l’équipage du Kontiki le 10 aout 1947, en provenance du Chili. Je n’ai pas lu leur histoire, je n’ai pas de connexion internet pour me renseigner ; je crois savoir qu’ils étaient 5-6 à bord, des hommes du nord de l’Europe, volontaires de prouver que les origines des peuples de Polynésie n’étaient pas seulement asiatiques et que des mouvements migratoires pouvaient avoir eu lieu dans ce sens aussi (est-ouest). Une stèle a été érigée en leur honneur, plaque relatant leur arrivée et le nom des équipiers, avec une couronne de corail. Le tout au milieu d’oiseaux nichant gaillardement sur ce petit motu loin de tout, au bout d’un bout de monde.

La météo est pas mal, mais on est toujours dans une bulle entre le beau et le mauvais temps, avec beaucoup de grains, et donc beaucoup de variation de force de vent, qui est très rafaleux. La température fraîchit, il fait « chaud devant et froid derrière » quand on est dans le vent, l’eau reste stable, autour des 25 degrés. C’est juste génial pour le kite, on n’a jamais d’appréhension pour partir à l’eau, même si le but est surtout d’être au-dessus de l’eau, haha. On progresse en douceur, on fait attention à ne pas nous mettre en danger, on ne tente pas de nouvelles choses quand on est les deux sur l’eau, on le fait seulement quand l’un des deux assure la sécurité de l’autre.

Il y a 4 bateaux pas très loin de nous, dont deux sont arrivés après nous, et une fois de plus l’adage se concrétise : le monde attire le monde. Mais allez savoir pourquoi, notre bateau reste souvent à l’écart, ça doit être inscrit quelque part : soit par une voile de kite qui faseye à l’arrière, soit par une hauteur d’eau sous la coque tellement minime qu’aucun quillard ne tente de se rapprocher.

Voilà les chouchous pour quelques nouvelles d’au milieu de nulle part, je vous confirme que Raroia n’est desservi que par un cargo par mois, un avion par semaine, et donc seulement un réseau 2G qui ne permet guère l’usage de WhatsApp (ou très difficilement) donc on communique par iridium avec grand plaisir.

Samedi 17 septembre 2022 – Raroia jour 3 (pour la rime)

Hier matin, tout comme ce matin, le vent est là et nous permet de tirer des bords bien sentis. On se déplace à toute vitesse, Hervé estime qu’on est proches des 20 nœuds quand la voile nous tracte bien, et je peux vous dire que ça file sous nos pieds et sous nos fesses !!! comme on a la chance d’être tout proches du reef, on a quasi pas de vagues, l’eau est plate, c’est idéal pour travailler la finesse du pilotage de la voile.
Par moments, on est presque couchés sur le dos à 15 cm de l’eau, les pieds bien enfilés dans les straps, les carres de la planche cisaillant bien la surface du lagon, et on file on file on file, c’est délicieux …  Du coup, on en perd l’habitude de naviguer avec des vagues, où c’est beaucoup plus « casse cou » et moins facile de travailler les choses nouvelles.

Alors là, en ce moment, on profite : Hervé de travailler ses sauts ; hier il est monté à 1m50, avec amerrissage en douceur, et ce qui est compliqué dans les sauts, c’est le timing et la coordination des différents mouvements. Avec un vent rafaleux, c’est encore moins facile. Et moi je travaille mes jibes, c’est-à-dire mes empannages « arrondis ». En fait, au lieu de tirer un bord puis un autre et faire des allers-retours avec une transition simple (on envoie la voile d’un côté puis de l’autre, en restant toujours sur la même quarre de la planche, donc en faisant des Z), je tente de faire des allers-retours en faisant des S, ce qui implique un changement de position, d’appui, et d’utiliser les deux carres de la planche, donc de naviguer à un moment sur les doigts de pieds, dos à la marche avant, et là … b’en soit je perds le contrôle de la direction, soit je perds le contrôle de la vitesse. Ca passe de temps à autre, mais c’est encore très chaotique.

Mais il faut qu’on profite, c’est le dernier lagon dans lequel les voiles seront en l’air, puisque quand nous quitterons Raroia, nous rangerons les kites pour … en tout cas un an. Peut-être on pourra en faire à Hawaï, mais certainement pas aux Marquises, où la mer est agitée, les vents encore plus rafaleux qu’ici, et l’eau … sombre, verte, chargée, pleine de grandes gueules à grandes dents … En fait, l’archipel des Marquises est un archipel beaucoup plus tourné vers la terre que vers la mer. A découvrir bientôt !

On est allé rendre visite à Mado-Madeleine et son « compagnon de lit » comme elle dit, qui sont les deux derniers employés d’une des fermes perlières qui a fermé à la suite du Covid. Ils attendent les ordres du patron, savoir si ça repartira (très hypothétique) ou s’il faudra démonter les structures et rendre le motu propre à la nature.
La ferme employait 60 personnes, et ils ne sont plus que deux. Elle est originaire de Fakarava, et lui de Tahiti. En discutant avec eux, on a découvert que les patrons par ici préfèrent employer des paumotus originaires d’autres atolls plutôt que les locaux, et cela semble vrai sur tous les atolls. La raison est simple : les fermes sont en général sur les motus, éloignées des villages. Si tu emploies des personnes du village, elles voudront rentrer chez elles pour le weekend, ce qui veut dire que tu dois les transporter (ça coûte de l’essence et du temps). Et puis les personnes du bled se blessent quelques fois le weekend, hors des heures de travail, mais se font porter pâles suite à leurs accidents alcoolisés, ce qui bien évidemment fait baisser la productivité à la ferme … Et puis les gens du village sont souvent moins dédiés à leur employeur, et font valoir plus de « droits » que les autres. Alors que quand tu engages quelqu’un venant d’un autre atoll, cette personne sait qu’elle est là pour plusieurs mois, pour travailler, et qu’elle sera coincée sur le motu de la ferme tout le temps de son contrat. Et comme elle n’a rien d’autre à faire que travailler, eh bien elle travaille. C’est donc plus avantageux pour les employeurs …

En abordant le sujet du manque de travail, puisque plus de perles, on leur demandait comment vivent les gens ici, et de quoi ils vivent, puisqu’il n’y a pas de tourisme, plus d’employeurs hormis la commune et la Poste. On n’a pas parlé d’allocations, on ne sait pas si le gouvernement polynésien intervient, mais dans les grandes lignes, chacun se débrouille. Soit avec la pêche, soit avec le coprah.
Dans chaque petite maison, il y a un gros congélateur, qui sert tant à conserver ce qui a été acheté (légumes, cuisses de poulet, ..) au magasin, que ce qui va servir à faire du troc avec les marins du bateau mensuel. Une grande partie du poisson pêché dans le lagon est éviscéré, puis congelé, et mis en sac. Chaque sac vaut 10’000 francs pacifiques. Pareil pour le coprah, chaque sac de coco séchée qui partira à l’huilerie vaut 10’000 francs. Lorsque le cargo arrive, chacun se présente auprès des marins avec son-ses sac-s, et effectue un troc en fonction de ses besoins : huile, sucre, farine, fruits, essence, et autres … Aucun échange de monnaie, juste des échanges de biens de consommation. Cela permet aux locaux de vivre simplement avec les produits dont ils ont besoin.

Comme la terre ne leur appartient pas, mais qu’elle est prêtée par leurs ancêtres, je suppose qu’ils n’ont pas de loyer. Et comme la Sécu prend en charge leurs frais médicaux (par le biais des dispensaires présents sur les grands atolls) et les déplacements liés aux problèmes médicaux, la base essentielle de leurs besoins est assurée … Pour mémoire, la longévité en PF ne va guère au-delà de 65 ans. Et les anciens vivent avec les plus jeunes, dans un esprit d’entraide et de communauté.

Je demandais à Mado pourquoi les polynésiens ne cherchaient pas plus à se former à la greffe pour développer leur propre business, et ne pas dépendre des employeurs chinois, et sa réponse a été plutôt simple : pourquoi m’enquiquiner à essayer de créer quelque chose, à devoir payer mes factures, à gérer des gens peu fiables, à m’occuper des autres, à trouver des clients, alors que je peux simplement travailler pour quelqu’un et avoir mon petit salaire à la fin du mois … ? pas besoin de penser, pas besoin de stresser, pas besoin de prendre en charge.

C’est difficile de déchausser nos lunettes d’européens de nos grands nez, et de regarder la manière de vivre des Polynésiens de manière simplement objective, sans comparaison ni critique, surtout sans tout mettre à l’aulne de notre mètre-étalon, sans « plus ceci et moins cela ». Je sais que je ne pourrai pas vivre à ce rythme, sans autre horizon que demain (voire ce soir), mais pour eux c’est juste ok, ils n’ont pas le choix de faire autrement, et ils sont bien ; en tout cas c’est ce qu’ils nous disent. Surtout ceux que nous avons rencontré dans les endroits loin des touristes et d’une économie « digne de ce nom pour des européens ». Ils vivent avec un certain respect de ce qui est, des autres et de la nature autour d’eux (bon, ils peuvent mieux faire au niveau écologie !), qu’ils soient humains ou poissons, ils vivent au jour le jour avec semble-t-il une certaine légèreté, volonté de profiter et de savourer, sans soucis, sans inquiétudes, juste là, ici et maintenant. De quoi réfléchir au Juste équilibre, quête éternelle …

Lundi 19 septembre 2022 – Raroia jour 5

Hier matin, tout comme ce matin, le vent est là, mais … comment dire … à force de demander à l’Univers de nous envoyer du vent, il a dû en avoir marre Univers, et se dire « bon, puisque tous les jours ils me demandent un peu plus de vent, je vais leur un mettre un sac de 10 kg, au lieu des 3 kg demandés .. » et dans sa générosité, nous voilà comblés, voire débordés … 32 nœuds ce matin au réveil, haha, et hier Hervé a pu tirer des bords plus que soutenus dans des airs oscillants entre 20 et 27 nœuds …

Autant dire que je ne mets pas l’orteil sur la planche dans ces conditions, d’autant plus que comme les airs ne sont pas établis, on navigue chacun à notre tour, pour assurer la sécurité. Dans ces airs-là, j’ai impérativement une voile plus petite que celle de mon chéri (qui est bien plus fort en muscles que moi), et on ne gonfle pas deux voiles en même temps au cul du bateau… Le vent est trop soutenu, en plus de ses variations, pour aller mettre une voilà « à la côte, accrochée à une patate » ce que nous faisons quand nous naviguons ensemble. Ca permet de laisser les deux voiles gréées sans risquer d’emmêler les lignes, et de partir et revenir au bateau facilement.

Du coup, b’en du coup, on s’occupe (ô joie ô bonheur les plaisirs ménagers, comme nettoyer les vaigrages de haut en bas, lessiver, cuisiner) on mange, on fait à manger (Hervé est en train de préparer une bonne bolo pour les lasagnes de ce soir, et pour quelques conserves de réserve qui viendront précieusement rejoindre les conserves de thon faites maison), on lit (lectures variées pour le plaisir, et lectures sur les Marquises pour préparer notre séjour aux abords de ces îles montagneuses) et on regarde la météo pour savoir quand on pourra-pourrait partir.

Les 30 nœuds qui soufflent actuellement devraient redescendre et se stabiliser autour de 20 nœuds, puis entre 15 et 20 ces prochains jours. Le vent devrait passer en secteur Est-Sud-Est, voir Sud-Est, avant de remonter à l’Est, nous offrant la fenêtre qu’il faut pour filer sur Fatu Hiva. Première île la plus au sud de l’archipel des Marquises. D’après certaines de mes lectures, le nom de Fatu Hiva -qui signifie 9 palmiers- devrait s’écrire Fatuiva -qui signifie l’arrivée de la lumière, du nouveau jour, l’aube-, mais on pourra mieux vous renseigner quand nous y serons.

Pour info, la distance en ligne droite entre l’île de Tahiti et Fatu Hiva est de 760 miles nautiques, soit 1’380 kilomètres.

Entre Raroia et Fatu Hiva, il y a 400 Nm, soit 730 km.

Et entre les deux archipels, il y a un groupement de petits atolls nommé les iles du Désappointement. Je souhaite ardemment que nous n’en rencontrions d’aucune sorte sur notre route !!! Croisons les doigts, haha.

Pour parcourir nos « au minimum » 730 km à la vitesse moyenne de 9 km/h, il ne nous faudra pas moins de 80 heures, et certainement plus.

Vous faites quoi vous en 80 heures ? certains ont fait le tour du monde en 80 jours (combien de kilomètres a-t-il parcouru le fameux Phileas ?), nous on naviguera contre le vent gaillardement, et vous à terre, à quoi ressemblent 80 de vos heures ?

Le lagon est déchaîné, les vagues aplaties par le vent mais leur crête a quand-même le temps de blanchir avant que l’écume ne se fasse emporter, les nuages se succèdent dans le ciel et le soleil joue avec eux, illuminant le bord du reef par moment, éteignant les turquoise, ocre, cobalt et autres tonalités d’un seul coup de vent ; l’ancre tient bien, on ne craint rien. On a juste envie que les fous qui volent autour du bateau (et du mât) et viennent jouer avec l’antenne et l’anémomètre cessent leur JAC, pour que l’anémo puisse enfin nous envoyer l’info que nous attendons tant : un joli vent établi entre 18 et 20, pour le plaisir d’aller tirer encore quelques bords. D’ici là, on vous fait des milliers de bisous doux et on vous souhaite un joyeux début de semaine !

Mardi 20 septembre 2022 – Raroia jour 6

 Hier soir, nous avons été invités à passer la soirée avec Yann et Ann, deux adorables canadiens, rencontrés dans le lagon au mouillage du Kontiki. Ils descendent des Marquises pour un bout de route dans les différents archipels, sont en balade pour un temps non défini ; lui ne bosse plus et elle rentre de temps à autre pour des missions en qualité de Sage Femme. C’est une personne solaire, touchante, qui a bossé dans des contextes très particuliers, Népal, Congo, Grand Nord, en vivant de situations dures et magnifiques à la fois. Ils sont venus prendre l’apéro il y a quelques jours sur Myriades, pour récupérer nos cartes et images satellites des différents archipels, puisque dans les Tuam on s’appuie beaucoup sur les images satellites pour naviguer dans les lagons ; Hervé en profite pour leur expliquer comment gérer les passes, et leur transmet tout ce qu’il peut leur être utile. Hier soir c’est donc nous qui avons sorti l’annexe pour passer d’une coque à une autre.

Le vent s’est adouci ce matin, se stabilise entre 18 et 20 nœuds, parfait pour sortir 2 voiles, oui 2, bien que nous soyons seuls, bien que personne n’assure notre sécurité, les conditions étaient trop parfaites pour kiter chacun à son tour. Imaginez bien que ce sont nos deux dernières journées dans les Tuam, il faut qu’on en profite au max !!! Presque pas de clapot, et des jolis airs, une eau incroyable, que demander de mieux ? simplement en profiter, à fond, en savourant !

Je vais essayer de vous décrire un peu le paysage pour vous faire rêver : petits motus avec quelques cocotiers à gauche et à droite du bateau, plus loin sur la gauche la langue de « terre » et son couvert de végétation. Le sol est doré, ocre doux, baigné dans le soleil, lumineux. L’eau, entre 5 cm et 10 mètres de profondeur, décline l’intensité des turquoise et des cobalt de manière incroyable, parfois en fondus parfaits, parfois en lignes strictes, passant d’un turquoise transparent à un turquoise foncé en l’espace d’un mètre, le banc de sable coralien tombant à la verticale. Ces délimitations s’agencent en une espèce de zig zag, le clair s’immisçant dans le foncé, et inversement ; un entrelacs délicatement intense. Une sorte de fermeture-éclair à deux couleurs. Et quand tu glisses avec ta planche sur cette fermeture-éclair, et que tu la « dézippes », c’est le bonheur intégral. Avec en toile de fond, la lumière très particulière réfléchie par cette eau si peu profonde, qui illumine le ciel par en bas. Je ne sais pas comment le décrire, mais c’est vraiment comme s’il y avait un spot hyper puissant qui baignait l’horizon « par en dessous », et ça donne des contrastes assez surréalistes, d’une incroyable beauté. J’aimerais tant être capable de traduire ces lumières avec mes pinceaux ou mes crayons ..

Sinon, b’en on prépare la nav vers les Marquises (un peu de miam miam et de rangements), on s’apprête à vivre 3-4 jours penchés, le bateau à la gîte constamment sur bâbord, donc on organise les coffres, le canap bâbord du carré (pour le rendre confortable et suffisamment long pour y dormir), on pense aux repas qu’il faudra cuisiner rapidement, tout se mettre « sous la main » pour ne pas avoir à plonger dans les coffres pendant qu’on se prend des vagues de 3m dans le nez, vérifier que rien ne tombe des équipets tribord, mettre dans la cabine arrière tout ce qui se trouve dans la cabine avant et dont on aura besoin, prévoir les bouquins, les livres audio, les pulls, les shorts, enfin bref, on se prépare à ne rien faire pendant 3-4 jours tout en trouvant les moyens de faire passer ce temps de manière la plus agréable possible.

Il est 18h au moment où je vous écris, je sirote un petit rhum à la santé de ces Tuamotus magiques et magnifiques, je suis heureuse de les quitter et triste en même temps. C’est un lieu où nous ne reviendrons pas et où nous avons passé du bon temps, du temps doux, du temps en connexion directe avec la nature, du temps hors du temps, un endroit où la lumière est particulièrement belle, le ciel immense, la voie lactée sublime car il n’y a aucune pollution atmosphérique ni lumineuse. Cette étape aura été une étape « pause, on reste là » choisie et décidée, malgré l’éloignement de tout, que nous avons savouré à chaque instant, à l’aulne du ballet habituel des émotions qui nous habitent. Merci la Vie, merci mon Chéri, merci moi, haha, on apprend finalement beaucoup de choses au milieu de rien. Je ferme ce chapitre de manière sereine, pleine de gratitude, et je me réjouis des nouveaux chapitres à venir, des nouveaux souvenirs d’avenir à écrire, à vivre, à créer.

Et je me réjouis aussi de pouvoir un jour (pas trop lointain j’espère) revivre des périodes estivales dans un lieu où le soleil ne se couche pas à 17.30 ou 18h, parce que ça nous prive vraiment de moments sympa ces journées où le soleil tombe si vite à l’eau.

Je vous embrasse, et je pense à vous toutes et toutes, individuellement, et vous serre contre mon cœur. Bisous doux.

Et puis sinon, pour information-confirmation, on pense quitter Raroia (les Tuam) jeudi 22 pour filer sur Fatu Hiva (les Marquises)

Jeudi 22 septembre 2022 – Raroia on s’en va

Hello world of Stars, here is the little Myriades, still in Raoria for few short hours.

Les nuits sont calmes bien que le vent souffle fort, l’équipage est donc à peu près prêt à affronter 3-4 jours de mer (et les nuits qui vont avec).

On claudique un peu comme des « vieux », mal au dos, à l’épaule, mal aux blessures de peau qui ont du mal à guérir en milieu salin, mal aux doigts, mais pas mal au cœur, ni au moral, ni à la tête, donc tout va bien !

On a encore pu se régaler hier avec nos deux voiles en l’air, c’est tellement joli, tellement joli ! ce paysage que l’on fend avec nos planches qui créent des gerbes d’eau pétillante et lumineuse, comme si des milliers d’étoiles venaient se glisser sous nos pieds pour mieux se révéler sur notre passage, c’est magique !

J’aurais adoré avoir d’autres kiteurs autour de nous, et des personnes qui puissent facilement assurer notre sécurité, ça m’aurait permis de travailler et progresser dans mes figures, voire de tenter les sauts … mais le fait d’être les deux à « rider » en même temps nous met trop à risque s’il nous arrive quelque chose. Bien que j’aie demandé à Hervé de se brider en peu et de ne pas essayer de faire des choses qu’il ne maîtrise pas, il a continué et continué à repousser ses limites, si bien que hier il y enchaîné quelques sauts assez sympathiques ! un beau bien haut, à mon avis il était au moins à 2m 2m50 au-dessus de l’eau ; un autre, la planche et les pieds au-dessus de la tête ; un autre encore, plus long que haut, et puis quelques jolies pirouettes aussi, quand sa voile change de direction au moment inopportun, ou qu’il amerrit sur le dos les quatre fers en l’air, bref, il s’amuse et progresse. Alors que moi j’ai facilement peur (trop de vitesse, me faire mal, perdre ma planche …) et du coup je ne progresse pas du tout aussi vite que lui. C’est fou que ce que notre mental peut nous limiter, voire nous faire capoter et rater tout ce qu’on tente … Mental mental quand tu nous tiens … !!

Donc à l’instant, on range le bateau après notre petit-déj, et on part pour le village, 10 miles, histoire de s’y arrêter pour voir si par hasard il y a 2-3 légumes à vendre, éventuellement un morceau de fromage ou une plaque de beurre, et puis on se présentera à la passe vers midi, pour quitter ce petit atoll.

Celles et ceux qui nous suivent toutes les deux heures verront notre petit point avancer vers le nord-est, et modifier notre cap en fonction du vent, et celles et ceux qui nous lisent moins souvent nous verront faire un grand saut entre Tuamotus et Marquises.

On vous embrasse du fond du cœur, et si mon estomac reste à sa place (j’ai tout fait pour), je pourrai vous donner des nouvelles de temps à autre. Plein de bisous !!

vendredi 23 septembre 2022 – Entre les Tuams et les Marquises

Coucou Tout le Monde !

On a fait un petit stop au mini village de Raroia, le temps de passer à l’épicerie attraper deux paquets de bonbons et autres cochonneries utiles dans une nav de plusieurs jours …

Et puis le temps d’aller faire la connaissance (trop rapide) de Jean-Jacques, paumotu de 60 ans (estimation à la louche). Il est le président de l’Association Agricole de l’ile qui vient d’être créée, avec le soutient du département d’Agriculture de PF.
Leur mission : faire en sorte que l’atoll soit indépendant au niveau de la production de fruits et de légumes, pour ne plus dépendre des cargos ravitailleurs pour ces produits-là. Et quel bonheur de découvrir un joyeux potager super bien entretenu, avec beaucoup de bacs en hauteur, qui produit en ce moment pota, salade, aubergines, poivrons, tomates, papayes, figues, uru, kawa, bananes etc … On a juste acheté quelques touffes de salade, et quelques pieds de pota, histoire d’avoir un peu de frais pour la semaine à venir. Il rayonne le Jean-Jacques, dans son rôle de président, et il est terriblement fier de montrer qu’avec un peu de boulot et de structure, on peut faire bosser 15 personnes ensemble pour le bien-être commun de tous les habitants !

J’écris depuis le fond de ma cabine arrière, où je me mets à l’abri du vent et du soleil quand je ne suis pas de quart. Mais c’est pas génial, alors je ne vais pas tarder à lâcher mon clavier … Voilà un peu plus de 24 heures que nous sommes en haute mer, loin de tout élément terrien.

La météo nous prévoyait un vent Est-Sud-Est, et une fois de plus, on constate un gros décalage … elle nous souffle ses 20 gros nœuds depuis le départ, avec un vent plus Nord qu’annoncé … pendant la nuit ça s’est un peu calmé, et ce matin ça repart. Point positif : 142 miles parcourus en 24h. Le vent étant variable, la durée de la traversée l’est aussi, et s’affiche en grand … 80 heures, puis 120, puis 105, et nous voila pour l’instant à « seulement » 45 heures de notre ligne d’arrivée … on croise les doigts pour que ça continue « bien », surtout avec moins de vagues … on a des talus de 3m qui nous chahutent !

Voila pour les news du jour, je retourne à ma léthargie et vous embrasse fort !

Samedi 24 septembre 2022 – Tuam-Marqu, acte 2

Samedi 24, tout va bien à bord !
Je croise les doigts, pas de mal de mer handicapant pour l’instant …

Quand je regarde cette immensité bleue tout autour de nous, et quand je me perds dans la succession des vagues, ballet incessant, j’ai quand-mème de la peine à imaginer que le paysage que j’ai sous les yeux est le même sur la moitié du globe terrestre …

Les nuits sont à peu près douces, le vent n’est pas trop soutenu et les vagues se calment un peu. A l’instant 13.5. noeuds de vent pour une vitesse bateau de 6.8. Quelques nuages dans le ciel, mais pas chahuteurs. Température du soleil sur mon bras : 39.5. Température du pont sous le soleil : 50 degrés !!! Heureusement, dès que le soleil file se coucher, la température permet de remettre un pull. Un pull ??? oui, un pull 🙂

Arrivée prévue à FatuHiva demain matin, chouette alors c’est bientôt fini !!!
Distance des dernières 24 heures : 162 Nm !!! Belle performance Myriades, bravo !

J’envoie mes pensées intenses à l’Univers pour que la fin de notre route soit agréable, et je vous embrasse fort ! Mon marin de mari aussi !

Dimanche 25 septembre – Les Marquises, nous voilà!

Ca y’est !!
Après 2 jours et 3 nuits et 18 heures, nous avons pu jeter l’ancre dans la baie de Omoa, au sud-ouest de Fatuhiva.

Quel changement de paradigme !!! Les Tuamotu nous ont baladés dans toute leur horizontalité, ici aux Marquises on va redécouvrir la notion de verticalité, haha !

Les airs et la mer ont plutôt été sympa avec nous, la vitesse moyenne assez élevée par rapport aux conditions attendues, et comme en plus il n’y a personne en mer, on a assez bien dormi, assurant nos tours de « watch » de manière régulière et surtout rapide.
On vous en racontera plus demain, mais pour l’instant il est juste l’heure de décompresser, sortir de notre tambour de machine à laver, tenter de retrouver notre horizontalité, ce qui n’est pas gagné car le mouillage ici est très rouleur ! Les tiroirs s’ouvrent sans crier gare, et on perd l’équilibre facilement en se déplaçant.
Les yeux piquent, on ne va pas tarder à aller les fermer, et on vous embrasse du fond du coeur.
A tout soudain

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