Nous arrivons à Hao sur les freins, c’est bateau-ballot quand-même … les vents annoncés devaient nous permettre de faire la route (500 miles) en 3 nuits, mais ils ont tellement molli et joué avec la girouette qu’on a pris une nuit de plus ; et farceurs comme Eole, ils se sont relevés quand on ne les attendait plus, et nous ont finalement obligés à freiner puisqu’il est impératif d’entrer dans cette passe très remuante de jour, qui plus est à marée montante, idéalement au vent portant.
Donc nous en sommes à faire des ronds dans l’eau devant la “Passe Kaki” (l’unique passe, au nord) de l’ile d’Hao. Les vagues sautent de tous les côtés et dans tous les sens dans la veine tumultueuse du courant qui sort de la passe. C’est notre première passe, on est un poil tendus … en tout cas très observateurs !!
Le premier AIS qui se signale (c’est le seul, d’ailleurs) : french warship. Bienvenue à Hao, base arrière de Mururoa où les avions venaient se “nettoyer” dans les années sombres du nucléaire, après avoir copieusement arrosé cet (!?!?!?) atoll du sud-est des Tuamotu. Ici aussi, les atomes s’arrêtent aux frontières, c’est bien connu.
Hao se trouve au 18° 5.144′ S et 140° 58.729′ W, archipel sud-est des Tuamotu.
Dimensions de l’atoll : 30 miles de long, sur 8 de large au mieux.
Altitude max : 8 mètres au-dessus du niveau de la mer. Autant dire que la frégate militaire toise l’ile de haut.
Nombre d’habitants : 1000 Paumotu (habitants des Tuamotu)
Hervé espère des boutiques et des bistrots ouverts, … on est dimanche et à mon avis les infrastructures villageoises doivent ressembler à Rikitea (Gambiers) : juste l’essentiel, c’est tout.
D’ailleurs, à propos d’essentiel, le boulanger de Rikitea a oublié de commander de la farine pour faire cuire ses baguettes et son pain, le dernier Taporo est arrivé sans son stock nécessaire pour alimenter l’ile de Mangareva pendant 1 mois … pas de pain frais dispo aux Gambiers pour les 3 prochaines semaines, et ils n’ont ni les stocks ni les moyens de se rabattre sur du pain de mie congelé à 12 € le paquet de 500 grammes … Donc parfois, souvent je pense, même l’essentiel manque dans ces archipels.
Le climat est déjà plus chaud qu’aux Gambiers. Il est 8h du mat, on est en short et mini-t-shirt, à l’ombre et dans le vent, et ça serait agréable que le thermomètre cesse de grimper. L’anneau de Hao est une langue de sable et de récif corallien sur lequel poussent des palmiers, cocotiers et autres plantes maritimes halophiles de petite taille dont une espèce de sapin-pin-conifère-hyper léger (je n’ai pas encore trouvé son nom ; ok je vais chercher. Réponse : le ‘aito, ou arbre de fer, Casuarina esquisetifolia), et puis le Tamanu Calophyllum inophyllum , ou encore le Tou Cordia subcordata et le Fara Pandanus tectorius. Je vous laisse regarder à quoi ressemblent ces arbustes. Ils ne sentent pas grand-chose, hormis le Tahinu Tournefortia argentea que j’affectionne particulièrement et que dont le parfum m’enchante et que je détecte de loin.
La navigation s’est bien passée, pas de mauvaises conditions, et on a fait route tout le long avec Max ; c’était sympa de pouvoir s’appeler matin et soir par la radio pour prendre des nouvelles, se raconter nos journées et s’encourager. On était distants au minimum de 3 miles, et au max de 10. Rigolo de naviguer en flottille, ça donne une dimension plus acceptable à cette immensité pacifique. Nos cannes ont titillé la poiscaille (la pouascaille ?) de concert, chaque bateau a sorti un mâle Coryphène d’un bon mètre, et on a pris un petit thon en plus pour notre repas commun en arrivant. Heureux les pêcheurs !!
A l’heure d’entrer dans la passe, vers 10h, les deux capitaines se sont fait des politesses … Hervé-Myriades “à toi l’honneur, tu es mon aîné” pendant que Hervé-Max réplique “à toi l’honneur, c’est ta première passe”. Est-ce que chacun, avec un peu d’appréhension, préférait être suivant que suivi ?
Hao, J+1. On essaie de s’adapter à notre nouveau rythme, puisqu’il fait nuit encore plus tôt à Hao qu’aux Gambiers … le soleil se lève à 6h et se couche vers 16h30, il fait nuit noire dès 17h … Hao est un grand atoll, mais un petit village d’un millier de personnes qui vivent … qui vivent tranquillement, sans se presser, un peu moins accueillant qu’aux Gambiers, mais peut-être est-ce seulement le premier jour, et surtout on est habitués maintenant à faire des sourires à tout le monde et à dire bonjour à tout le monde. Là, pour l’instant, on a un peu une impression de fin du monde ici. Qu’il ne se passe pas grand-chose.
Le village de Otepa est en fait l’ancienne base militaire française qui a piloté tous les essais atomiques sur Mururoa, donc il reste pas mal de bâtiments en dur et en bon état, et puis sinon c’est des petits baraquements typiquement polynésiens : des tôles, du contre-plaqué, quelques cordes et des boulons. Le gouvernement sponsorise les habitations sur pilotis de béton, avec l’équivalent de 1 ou 2 ou 3 containers (en termes de volume) montés par des parpaings de contre-plaqué, un toit de tôle haubané par des câbles qui le rattache au sol, des grandes découpes dans les façades en guise de fenêtre avec une plaque de bois étayée par un bâton de bois quand on veut ouvrir la fenêtre, derrière lesquelles se balancent des rideaux colorés pour conserver un peu de privacité. Chacun a sa petite baraque-maison, par de grandes constructions par ici hormis le collège, la salle de sport ; tout est construit sur un seul niveau, à même le sol. En fait, comme tout, absolument tout, arrive sur ces îles par cargo, on comprend pourquoi il n’y a quasi aucun bâtiment en briques, et que les installations sont sommaires.
Ici comme aux Gambiers, les rues sont super propres, les parcelles bien entretenues (ou alors pas du tout, mais c’est vraiment soit l’un soit l’autre), les plantes locales jaune-vert-rouge bordent les chemins, les fleurs ont tout l’espace nécessaire pour s’épanouir. Par contre ici à Hao, la terre est beaucoup moins fertile, puisque c’est un atoll corallien. La nature est donc moins exubérante, moins généreuse, fini les pamplemoussiers, citronniers, manguiers et autres «fruits-iers » sauvages. Les arbres sont petits, contraints par les vents et l’air salin, et les essences moins variées.
L’atoll de Hao est le second plus grand lagon du monde : 30 miles (55 km) de long, sur 8 (15 km) de large au mieux. C’est un anneau de corail dur, de soupe de corail et de sable blanc, qui mesure 0,2 mile (350 mètres !!!) de large, à son endroit le plus large. L’est de l’atoll « sort » de l’eau, l’ouest de l’atoll est une succession de terres immergées (les platiers) et émergées (les petits motus) selon le niveau de la mer. Avec ces dimensions, on entend le Pacifique venir s’écraser sur les terres depuis partout, tout en étant sur un plan d’eau plat (le kiff !!).
Altitude max : 8 mètres au-dessus du niveau de la mer… on a pédalé hier pour aller jusqu’au phare de la passe Kaki (30 km aller-retour), et je peux vous dire qu’après longue observation, je ne sais pas où ils ont pu prendre cette mesure 😉 c’est tout plat !!!!
Elle est vraiment toute étroite cette langue de terre-récif sur laquelle vivent ces gens. Et j’ai vraiment de la peine à imaginer comment on peut passer toute une vie ici. Et en même temps, on vient de rencontrer un prof français qui est là depuis 4 ans (et qui repart dans 1 mois), et il nous dit que c’est juste le paradis. Oui, je peux entendre. Tout dépend des souhaits de chacun, et de ce qu’on a envie de vivre, d’accomplir et de réaliser les uns et les autres. On a tous des besoins différents aussi.
En allant s’annoncer à la gendarmerie, on leur a gentiment demandé ce qu’il y a à savoir à propos de Hao, et la réponse du militaire était assez succincte : rien. Haha .. ou si peu. Rien de particulier hormis les horaires de l’ile, l’emplacement des deux-trois épiceries et des 2 snacks, et .. ah si, et que le lagon nous est entièrement ouvert, mais pas cartographié. Et que les motus sont privés. Je demande gentiment si on peut y aller, si on peut débarquer en demandant évidemment aux locaux si c’est possible, ou si on encourt les mêmes risques qu’en Corse (tout cela dit sur le ton de la plaisanterie, bien sûr), et là il me toise et me répond « je suis corse », puis complète -après un petit blanc bien pesé- que s’il y a du monde on demande, s’il n’y a personne on peut débarquer (et remporter nos poubelles), et que si des chiens nous accueillent, ce n’est pas la peine de débarquer. Petit moment de solitude 😉
Ici chacun vit à son rythme tranquille. Comme l’ile est vraiment plate et les distances courtes, beaucoup de Paumotu circulent en bicyclette, et même très souvent en tricycle. Super pratique : dans le panier arrière tu mets toute la famille, et dans le panier avant, le coca et la baguette. Certains ont des voitures quand-même, surtout ceux qui exploitent la coco puisqu’ils doivent apporter au port leurs gros sacs séchés au soleil contre quelques centaines de francs pacifiques.
A l’heure de la sieste, tout le monde dort, y compris les chiens au milieu de la rue. Il faut dire que la journée commence tôt, très tôt, alors il est impératif de se reposer quand le soleil est au plus haut. Du millier de personnes qui vivent sur l’île, 250 sont des enfants en âge de scolarité, entre 4 et 19 ans (2/3 sont des internes qui viennent d’autres atolls). 50 personnes les encadrent, dont 20 profs. Une centaine de personnes travaillent à la mairie, et le reste des « actifs » vivent d’emplois précaires et du travail du coprah (séchage de la chair de noix de coco, à des fins alimentaires et produits d’hygiène). Beaucoup d’inactifs … qui passent leur temps en écoutant de la musique, un fil de pêche à la main au bord de l’eau, ou qui flânent, ou qui rigolent, ou qui patientent, ou qui …
Quand les jeunes filles n’ont plus envie d’aller à l’école, elles font des bébés. Et puis si les bébés (et les chéris) leur plaisent vraiment, elles les gardent, et si pas d’atomes crochus, elles quittent les chéris, confient leur bébé à leurs parents, et partent en chasse d’un nouveau chéri pour faire un nouveau bébé. Il parait qu’il n’y a quasi pas de couples « du premier bébé » qui durent et qui fondent une vraie famille. Du coup, les jeunes mamans vivent de leurs allocations familiales, sur la retraite de leurs propres parents, ou sur les allocations chômage de leur chéri. Pas tellement de perspectives ici, hormis vivre chaque jour pleinement, et leur sourire nous laissent penser qu’ils sont sincèrement bien et heureux. Pas/peu de stimulation intellectuelle des enfants (vive les nounous smartphone), niveau éducatif catastrophique, l’horizon est à demain et pas tellement plus loin pour ceux qui n’ont ni les moyens ni la chance de quitter leur île natale. Tout ça je vous le livre tel que nos visiteurs d’hier soir nous l’ont transmis.
A 16h, la mairie ferme ses bureaux, et ouvre sa connexion internet gratuite pour ceux qui en ont besoin. Résultats : les jeunes surfeurs d’aujourd’hui, sans planche aux pieds, et les moins jeunes surfeurs se retrouvent sur les bancs publics pour s’évader au travers de leur petit écran.
Sur la place de la mairie se prépare le Heiva, festival local célébrant la culture polynésienne. Les stands (de bouffe et d’artisanat) se montent petit à petit. On retrouve les structures en contre-plaqué et toit de tôle, mais cette fois les devantures se parent de feuilles pour habiller les murs de manière festive. On ne sera malheureusement plus là pour voir les défilés, les danses et écouter les chants locaux … dommage !
On a pris l’apéro hier (17h30 l’apéro, dans la nuit) avec le prof, la médecin de l’ile (en mission ici pour 6 mois) et une autre louloutte (prof elle aussi, en mission courte durée), qui sont venus chercher ici une vie calme, proche de la nature, et qui pour certains adorent ce cadre, et pour d’autres, le trouvent trop limitant, en hypo-stimulation intellectuelle, en sous-relations-sociales, parfait pour quelques mois mais pas plus. En dehors de leur vie professionnelle, ces trois-là passent tout leur temps sous l’eau ou à faire un peu de vélo (aller-retour rectiligne jusqu’au phare après la piste de l’aéroport) ; donc effectivement, c’est un environnement plus adéquat que Paris ou Lyon.
Cette nuit le vent a tourné, il est passé du nord-ouest au sud-est, ce qui fait que nous avons trouvé un abri dans la darse du village, petite enclave bétonnée qui nous permet d’être protégés des vagues. Le problème dans les Tuamotu, plus que les vagues, c’est les patates de corail ! Des pièges à chaine !! Les eaux sont profondes même très près de la côte, difficile de mouiller par moins de 15-20 mètres, et l’eau n’est pas assez transparente pour voir les fonds. Donc lors de notre premier mouillage, on a réussi à faire tout faux (mais ne pouvions pas le savoir… ) : 2 patates de corail dans la chaîne … l’ancre est venue se poser SUR une première patate, avec ses 20 mètres de chaine, et puis après la chaine a filé sur 20 mètres supplémentaires posée sur le fond, en ayant la géniale idée d’utiliser une seconde patate de corail comme un « piquet » pour former un magnifique zigzag.
Heureusement, Hervé-Max adore plonger, il est donc venu à la rescousse pour descendre suffisamment sous l’eau, de manière à zyeuter ce qui se passait, et nous transmettre après les directives et directions pour aller refaire le tour de la seconde patate, et finalement décrocher la chaine de la première … Manœuvre à succès, merci Hervé-Max !! (c’est pas qu’on veut pas le faire, mais mon chéri ne peut pas plonger, et moi j’ai peur sous l’eau … donc pour la première, on s’est fait assisté. Maintenant je suis en train de passer mon open-water, donc j’apprivoise mes craintes tout gentiment).
Du coup j’en ai profité pour faire mon baptême de narghilé (compresseur qui envoie de l’air dans 15 mètres de tuyau, avec un détendeur au bout qui permet à celui qui plonge de passer pas mal de temps sous l’eau sans problème). Donc ma mission du jour : plonger avec le narghilé pour aller poser une retenue sur un corps-mort dans le port, pour nous décoller du quai, car le vent commence sérieusement à nous y écraser, et on annonce 20-25 nœuds pour ce soir. Cette manœuvre aura un deuxième but : nous éloigner du quai où se baladent les rats pendant la nuit … Hervé est allé acheter 3 pièges ce matin, qui seront garnis de fromage (et de beurre de cacahuète) dès ce soir, pour les visites de ces petites bêtes nocturnes. Elles ont laissé leurs petites traces clairement identifiables cette nuit, nos voisins en ont attrapé 3 hier, donc on va tout faire pour les empêcher de monter à bord !!
En fin de journée, pour une raison non-identifée, la voiture rouge « véhicule sanitaire tout-terrain » des pompiers vient d’arriver au bord de l’eau, la plaque d’immatriculation à peine accrochée au parechoc, et un pompier en sort : T-shirt rouge ample, délavé et déformé, vieux short Reebok bleu roi, pieds nus, ganté de bleu et masqué. Pas mal l’uniforme local 😉
Hao, J+14. Comment diable est-ce possible que deux semaines nous aient passé entre les pattes sans que nous nous en rendions compte ??
Est-ce une preuve de ma progression dans le « vivre ici et maintenant, sans penser à demain » ? Si c’est le cas, je ne sais s’il faut m’en réjouir ou en avoir peur …
Autre preuve que cette constatation apporte : je n’ai pas fini de « me prendre la tête » et ne sais pas encore faire taire celui qui vit sa vie indépendante entre mes deux oreilles, m’emmenant en voyages infinis dans des pensées tumultueuses à l’image de la Polynésie : avec relief et multiplicité des possibles (les Gambiers, et les Marquises, encore inconnues), avec platitude et manque de perspectives (les atolls des Tuamotu) .. Peut-être l’archipel des iles de la Société m’apportera le juste équilibre entre les deux ? Et comme chacun le sait, l’équilibre est en redéfinition constante 🙂 Donc ? Donc je suis loin d’avoir fini de vivre les tribulations de mon cerveau en bateau. CQFD, haha 🙂 C’est bon, je peux continuer à être moi 🙂
Ici donc … le temps file, le temps passe, comme les nuages poussés par les souffles océaniques. Aujourd’hui il n’y a pas un pet d’air, le lagon ressemble à un vaste miroir dont le reflet est parfois ridé par une petite risée, la moiteur de l’air nous fait coller à tout ce qu’on touche, même les doigts sur le clavier peinent à s’en détacher. De manière générale, la situation est étrange. Nous trouvons la chaleur imaginée aux Tuam, mais pas du tout les vents attendus … normalement à cette saison, les alizés soufflent d’est en ouest en nous offrant un bon 15-20 noeuds, et là, depuis 2 semaines, on a pu sortir les voiles de kite 2 fois seulement, autant dire : pas de vent ! Les nuages sont assez présents, pas mal de grains qui nous passent dessus allègrement, de jour comme de nuit, nous obligent à poursuivre notre jeu favori à Hervé et moi : j’ouvre la fenêtre, tu fermes la fenêtre, j’ouvre, tu fermes, j’ouvre … et paf, tu oublies de fermer et tout est trempé (le lit, le canap, …).
L’eau du lagon est à une température idéale, mais la visibilité ne porte pas à plus de 5 mètres ; beaucoup de sédiments viennent troubler le monde sous-marin et l’horizon des snorkeleurs est du coup limité. On est autour du village pour des raisons de ravitaillement et de réseau wifi, mais on est aussi allé mouiller à deux endroits plus au sud du village : Kauwa 1 et Kauwa 2, langues de corail qui s’avancent dans le lagon, perpendiculaires au reef, et qui nous permettent d’être à l’abri des vagues. Là-bas, on a aussi le plaisir de se balader sous l’eau avec nos masques, tubas et palmes, et d’aller à la rencontre des perroquets, balistes, carangues, chirurgiens et autres petits poissons de récif. Lors de notre dernière sortie, on a eu l’immense chance de nager au-dessus d’une raie manta, qui s’est arrêtée le temps de nous observer, puis qui a repris son vol majestueux vers des fonds plus profonds.
En revenant au village, Hervé raconte notre jolie rencontre à Angèle, une Paumotu qui essaie de mettre en place des « facilités pour les voileux » (lavage de linge, gazole, essence, commandes et réceptions de marchandises), et elle lui rétorque avec un grand sourire : « une seule ?? mais moi chaque fois que je vais me baigner là-bas j’en vois au moins 10, 15 ». Il parait qu’elles nagent en bande, on appelle ça un train, qu’elles viennent se faire nettoyer par des plus petits qu’elles, mais qu’elles sont plus souvent « de l’autre côté » de la langue de corail … Ca tombe bien, comme il n’y a pas de vent ces prochains jours, on va pouvoir y retourner, à moins qu’on se rapproche de la passe Kaki (la seule passe de l’atoll, qui est au nord du village) pour tenter d’apercevoir les plus gros qui nagent par là-bas : il parait que c’est le territoire de 3 requins tigres, et d’un certain nombre de mantas. Plus évidemment les mérous, pointes noires et pointes blanches, et autres gros jolis poissons.
Les couchers de soleil sont splendides quand ils le veulent bien, et nous offrent quelques fins de journées de toute beauté. On a profité de l’une d’elles pour se faire un petit bbq sur la plage, au « Sun Downer », avec musique, bière locale et nos dernières saucisses chiliennes, c’était bien cool !
Hier soir on a dégusté une soirée locale au restaurant, ou plus exactement à la table d’hôtes d’une pension du village. Le Paumotu nous avait recommandé de goûter à la carangue grise (surtout pas la bleue, elle est gratteuse) et on a choisi de lui faire confiance … bien nous en a pris ! il est allé dans la journée pêcher les poissons, puis les a préparés au four avec huile d’olive, curry, miel et piment oiseau, c’était délicieux ! Accompagné de chips de taro (tubercule local) et haricots verts (surgelés), boissons apportées par nos soins car il n’a pas de licence pour vendre de l’alcool, c’était délicieux et une belle découverte.
Et puis comme c’est une table d’hôtes, on a mangé avec un tahitien en mission à Hao et le responsable de la pension. Ils nous racontaient qu’ici les seuls « visiteurs » sont des polynésiens en mission (travaux pour la commune, etc..) et les profs. Quasi aucun touriste. En fait le problème des Tuam, c’est l’approvisionnement en eau potable.
La seule source est la pluie, et les bouteilles en pet importées depuis Tahiti, ou en verre importées depuis l’Europe … C’est un frein majeur au développement des îles et des atolls, puisque sans eau tu ne peux rien cultiver (ici la terre est salée, l’eau que tu trouves quand tu creuses ton puits est salée, donc ça répond aux besoins des plantes halophiles, mais pas aux tomates, aubergines, salades). Au niveau économique, pas de développement non plus puisque tu ne peux rien créer qui dépende de l’eau (et au niveau tourisme & restauration, c’est un élément majeur).
On partira demain pour retourner « là où il n’y a rien ni personne » dans nos mouillages du sud, en attendant que la météo confirme des vents plus soutenus pour quitter enfin Hao et partir à Makemo (180 miles nautiques, donc a priori 2 nuits en mer, vu les horaires de courants dans les passes, et la nuit qui tombe super tôt).
On a rendez-vous le 11 juillet à Fakarava avec Nathan, on a hâte d’y être pour l’immense plaisir de le retrouver, mais promis, on va bien profiter du temps en attendant, et essayer de vivre plus consciemment et intensément ce temps qui passe.