Après avoir enfin reçu la pièce pour réparer notre moteur, nous avons levé les voiles depuis Ginesta (banlieue sud de Barcelone) pour une traversée toute tranquille avec un vent modéré, direction Minorque. Nuit tranquille, voile et moteur, on a joué à cache-cache avec les pêcheurs (ces petits sagouins éteignent leur AIS pendant la nuit, se signalent à peine, et juste avant que nous leur « tombions dessus » ils allument leur gyrophare pour annoncer qu’ils sont en manœuvre …). Au lever du jour, deux dauphins nous frôlent sans s’arrêter. Les deux seuls depuis que nous sommes sur l’eau !!
Nous découvrons le charme de Ciutadella, jolie bourgade de la côte ouest, charmante, historique, lumineuse, mauresque et catalane, élégante, de jolis bâtiments et une atmosphère toute particulière. Elle donne vraiment envie de s’y arrêter pour y flâner : son marché plein de vie -jolie halle en fer forgé accueillant les étals, entourée de petits bistrots où les petits déjeuners locaux fleurent bon- sa cathédrale simple et imposante, sa vieille ville où il fait bon déambuler dans les ruelles étroites, au soleil du matin et au couchant, y déguster quelques glaces et savourer le charme de certaines cours intérieures où le couvert est délicieux.
Dans les environs, on visite les fameuses carrières de Lithica, impressionnantes, géométriques et vertigineuses. Intéressant de découvrir comment les hommes ont réussi à arracher les blocs de leur falaise, un par un, avec quelle patience et quels outils, et puis d’apprendre comment les carrières ont été reconverties dans le temps : d’abord renflouées d’une bonne couche de terre pour les transformer en jardins potagers, à l’abri du vent, au soleil et avec une humidité contrôlée, puis lorsque les légumes ne poussaient plus, ils y plantaient des arbres, oliviers, amandiers et autres fruitiers. Un plaisir de s’y balader.
Et puis avec nos vélos, nous explorons aussi la côte, et découvrons le pont d’En Gil dans les falaises, on suit un petit peu le sentier des Cavaliers. Quel bonheur d’avoir choisi ces vélos-là !! on peut « tailler » la route longtemps, et du coup rayonner loin du bateau.
Puis nous filons sur Mao (aussi dit Port-Mahon) à l’est de Minorque, sans pouvoir vraiment nous arrêter en route pour savourer les méandres de la côte : un “régime d’est” est bien installé depuis plusieurs semaines (vent d’est, ciel nuageux, mer formée avec vagues venant du sud-est) ce qui nous empêche de savourer la joie des criques sauvages. Tous les beaux clichés qu’on trouve sur le net, les arbustes bien verts courant sur une pente rouge qui se jette dans une eau transparente, turquoise, limpide, eh bien nous les voyons avec une mer grise, chahutée par le vent, ça ne donne pas trop envie de se baigner et les calas sont impraticables …
La mer, parfois elle est grosse, parfois elle est plate -rarement en ce moment-, souvent elle est grise, parfois c’est une mer écrasée et travaillée par le vent, brillante et lumineuse sous des nuages noirs, aussi grise que le ciel, comme de l’acier, façonnée par les vagues et les risées, hachurée, illuminée par le soleil caché derrière les nuages.
Et puis la terre, comment décrire Minorque … c’est plat et vallonné en même temps, mais des dénivelés tout doux, faciles à aborder en vélo. C’est une île très basse sur l’eau, et ce qui est sympa c’est cette chouette relation qu’il y a entre la terre et la mer, les calas en pleine ville, les petits bras de mer qui se faufilent par une petite ouverture dans la côte. Terre plutôt aride, sèche, rouge, domptée par l’homme qui y aligne ses murs de pierres sèches, ses parcs à chevaux, ânes et cochons, et qui trouve le moyen d’y cultiver sur des petites surfaces des lieux où poussent la vigne, les vergers, les oliviers, les figuiers, et autres petits arbres et buissons. Mao-Mahon ne nous laisse pas un souvenir incroyable, mais sa campagne environnante est superbe à sillonner, très douce pour les yeux, foisonnante, tout est à hauteur d’homme, le regard peut se perdre facilement et dériver par-dessus les champs. Le petit moulin de Sant Lluis, le bout de village tout blanc de Binibequer, attrape-touristes par excellence, mais qui a un certain charme quand-même malgré le sentiment de « décor en carton-pâte ».
Pour la traversée entre Minorque et Majorque, Hervé a installé le dog-house pour le tester, puisque nous allions rencontrer la pluie. C’était l’occasion rêvée d’après la météo … On a été plus que servis, mais surtout à l’arrivée sur Majorque. Pourtant on la regardait bien évoluer cette cellule orageuse … eh bien on est allé la chercher en son plein centre !!! Torrents d’eau, vent à décorner les bœufs (37-38 nœuds en rafale), éclairs et tonnerre en veux-tu en voilà … intense !!! on le vivait et on le « suivait en live » sur l’application Windy qui relaie les orages en direct, ça nous permettait de nous préparer à la suite et de savoir s’il s’éloignait ou pas … Et puis après, hop, retour du grand calme, la baie ressemble à un lac, serein, tranquille. Récompense : douche chaude et une bonne fondue !! On la savoure, on s’en régale !!!
A l’heure où j’écris, la crique est super calme, et je me marre : il n’y a pas un bruit, la nuit est tombée, on entendrait voler une mouche … et ça fait 1/2 heure que le voisin fait tourner son générateur (bruit d’un zodiac qui te tourne autour non-stop) !!! Et hop, quand le moteur se tait, c’est au tour de l’hôtel de la plage de lancer sa soirée « Spectacle », on entend tout … Puis que tout se clame, on savoure les rires sur un bateau voisin, une guitare qui s’accorde au loin, les petites voix des enfants qui veulent faire un dernier jeu avant de filer sous la couette, … c’est paisible, c’est bon. Douce nuit en perspective…. C’était sans compter sur l’orage de 3 heures du mat 😊
Vous trouverez plus de photos de notre courte halte à Minorque sur notre page Facebook.